Silwan ou le nettoyage ethnique en action

Silwan, maison colonisée par Elad (suivre la flêche) (@JM, 2010)
Silwan, maison colonisée par Elad (suivre la flêche) (@JM, 2010)

Bulletin 45

Depuis l’occupation de Jérusalem-Est par l’armée israélienne en juin 1967 et son annexion illégale par le gouvernement israélien, la physionomie de la ville a considérablement changé. Exemple de Silwan.

Les changements ont commencé d’abord par la construction de blocs de colonies et de routes. Ensuite par l’implantation de colons au cœur même des quartiers palestiniens. C’est le cas du village de Silwan, juste au sud de l’esplanade des Mosquées, au pied des murs de la vieille ville.

Au début des années 90, un organisme privé, Elad, a reçu des autorités israéliennes la responsabilité de la gestion des sites archéologiques de Silwan. Cette organisation d’extrême droite est un mouvement de colons dont la mission consiste à « renforcer le lien juif entre Silwan et Jérusalem, par le biais de tours guidés, de l’installation de colons et de la publication de documents ». Rapidement, les colons ont occupé des maisons palestiniennes (comme la maison familiale des Ghozlan), installé des infrastructures touristiques sur les sites archéologiques (le centre d’accueil « cité de David ») ou sur des terrains non bâtis (comme une série de parkings dans la vallée face au quartier d’al Bustan). L’installation des colons a entraîné le renforcement de la présence policière israélienne et la multiplication des caméras de surveillance dans les rues du quartier.

Mais cette intrusion sécuritaire dans le quartier s’est traduite par une augmentation dramatique de l’insécurité – pour les Palestiniens. Alors qu’il protestait dans la rue contre un colon qui venait de frapper son fils, Ahmed al Qaraïn a été touché par plusieurs balles tirées par ce colon. Dans le même temps, Amir Froukh, adolescent de 13 ans, était lui aussi blessé. La justice israélienne a déclaré l’affaire classée, sans même engager de poursuites contre l’agresseur. Ce harcèlement n’épargne pas les enfants : Muhammad Dweik et Ahmad Siyam, 12 ans, comme Lu’ai a-Rajabi ou Mahmoud Gheith, 14 ans, ont tous été arrêtés chez eux, en pleine nuit, avant d’être interrogés, souvent de manière brutale selon leurs témoignages à l’association B’Tselem. Le harcèlement des colons ou de la police n’a qu’un but : pousser les habitants au départ. Riad Tawil, dont la maison a été attaquée par un groupe de colons début juillet, a entendu ses agresseurs déclarer : « C’est la ville du roi David et toutes les maisons sont des maisons du roi David, sortez d’ici.»

Une politique municipale ouvertement colonialiste

Cette politique raciste est vigoureusement soutenue par les autorités israéliennes. Le 28 juin 2010, le maire de Jérusalem a annoncé un plan de destruction de 22 maisons à Silwan, pour faire place à un centre touristique. Selon le journal Haaretz, le service qui inspecte les plans de construction avant leur soumission au comité de planification a trouvé pas moins de 250 erreurs dans ce plan. En outre, juste une semaine avant que le plan ne soit approuvé, l’ingénieur Shlomo Eshkol, fonctionnaire de la municipalité de Jérusalem, a présenté une liste de 30 critiques de ce plan. Le conseiller juridique de la municipalité de la ville, l’avocat Yossi Havilio, a également constaté que le plan ne répondait pas aux normes juridiques. Les efforts de la municipalité pour développer les infrastructures coloniales tranchent avec l’attitude des autorités israéliennes vis-à-vis de la population de Silwan : depuis 1967, pas un seul permis de construire n’a été délivré à des Palestiniens ni aucun projet d’infrastructure urbaine ou sociale développé dans le quartier.

La pression coloniale s’accentue sur les Palestiniens de Jérusalem, à Silwan, au sud de l’esplanade des Mosquées, comme à Sheikh Jarrah, un quartier situé au Nord de la vieille ville. L’offensive coloniale soutenue par les autorités israéliennes à Silwan vise ouvertement à empêcher toute division de la ville, prétendant rejeter définitivement les Palestiniens à la périphérie des quartiers de Jérusalem illégalement annexés par Israël.

Julien Masri

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