Editorial – Bulletin 45
Madame Ashton, vice-présidente de la Commission européenne, Haute Représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, ne s’est pas rendue à Washington pour l’ouverture à l’américaine de nouvelles négociations entre l’Israélien Netanyahou et le Palestinien Mahmoud Abbas. Certains s’en sont offusqués, d’autres y ont décelé la faiblesse de l’Europe, acteur contournable sur la scène internationale.
Et si, à cette occasion, les Européens, dans la ligne de la déclaration adoptée en décembre 2009, avaient posé un acte politique tout à fait cohérent ?
Revenons à cette déclaration du 8 décembre, obtenue à l’initiative de la présidence suédoise du Conseil de l’Union européenne. Elle recadre avec précision les conditions mises par l’UE pour aboutir à une paix juste et durable au Proche-Orient : coexistence de deux Etats et règlement des questions relatives au statut définitif des territoires palestiniens (frontières, réfugiés, statut de Jérusalem,…) sur la base du droit international et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Le Conseil de l’UE rappelle par ailleurs, dans cette déclaration, l’illégalité des colonies de peuplement, lesquelles, tout comme le Mur, sont érigées en territoire palestinien, en violation des principes du droit international. Il dénonce enfin avec vigueur l’annexion de Jérusalem-Est et appelle les deux parties à faire de cette ville la capitale des deux Etats.
Ces conditions ont-elles été réunies et ont-elles une chance quelconque d’être respectées lors des négociations engagées à Washington entre M. Abbas et M. Netanyahou ? Celui-ci a obtenu, dès avant la première rencontre, que le président américain abandonne sa seule précondition, à savoir la fin de l’extension des colonies. Cette première victoire de M. Netanyahou est accompagnée de la relance des relations de proximité entre les USA et Israël, œuvre de Madame Clinton, appuyée par le lobby pro-israélien aux USA. Ainsi que l’a déclaré tout récemment Karel de Gucht, commissaire européen, un président américain ne peut se passer ni des fonds, ni de l’influence de ce groupe de pression à la veille des élections de mi-mandat.
Face à M. Netanyahou, M. Abbas s’est donc vu forcer la main et n’a pas eu d’autre choix que de se rendre à Canossa. Dépendant de l’aide internationale pilotée par les USA pour sa propre survie, pour celle de son administration, de sa police et des populations sinistrées de Gaza, il a fait choix et accepté de se plier aux volontés américaines. Aura-t-il une quelconque marge de manœuvre pour défendre la seule position qui devrait être la sienne et à laquelle adhère l’UE, à savoir l’initiative de paix de la Ligue Arabe , qui implique l’application stricte du droit international, des résolutions des Nations Unies, des Conventions de Genève et du droit humanitaire ? La résistance du peuple palestinien et la solidarité populaire internationale constituent par ailleurs les meilleurs atouts dont disposent les représentants de la cause palestinienne dans la perspective d’un règlement juste et durable du conflit et de la coexistence entre Israël et la Palestine, avec Jérusalem comme capitale des deux Etats.
Pierre Galand
Président
Septembre 2010