Le groupe de réflexion palestinien indépendant Al-Shabaka a récemment mis en place une matrice de scénarios sur l’avenir de la Palestine. Il s’agit d’un outil en ligne dynamique qui invite les internautes à envisager différents cas de figure (maintien du statu quo, effondrement de l’Autorité palestinienne (AP), nouvelle intifada…) et leurs conséquences sur différents secteurs palestiniens (gouvernance, économie, éducation…). Si tous sont loin d’être optimistes, certains ouvrent des perspectives encourageantes. En conclusion de ce dossier, nous reproduisons ici le scénario examinant l’effet que pourrait avoir sur la société une refondation de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), organe historique de la lutte nationale, aujourd’hui cadenassé par l’AP.
La renaissance de l’OLP pourrait permettre de restaurer la représentation du peuple palestinien à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine colonisée et de le soutenir dans sa lutte permanente contre l’occupation coloniale et l’apartheid du régime israélien. À condition toutefois de respecter quelques prérequis.
PRÉREQUIS POUR UNE OLP REVITALISÉE
Les structures d’une OLP revitalisée doivent être fondées sur la représentation inclusive, la crédi- bilité et la légitimité nationale pour représenter politiquement l’ensemble des Palestiniens, où qu’ils se trouvent, via un processus démocratique. Tous les représentants des communautés palestiniennes doivent participer aux institutions de l’OLP renouvelée. Cela permettrait de garantir
la responsabilité des représentants nationaux, notamment en matière de répartition du pouvoir, ainsi que la liberté d’expression et d’association. Le Conseil national palestinien (CNP) serait tenu de rendre des comptes par le biais d’élections régulières ou d’autres formes de sélection démocratique. En outre, le Comité exécutif de l’OLP serait responsable devant le nouveau CNP, y compris en ce qui concerne les sources de financement. Tout cela serait clairement inscrit dans les statuts de l’OLP.
Par ailleurs, une nouvelle OLP devrait s’appuyer sur l’héritage des mouvements palestiniens laïques de résistance civile, en respectant la séparation entre les institutions politiques et reli- gieuses, et en donnant la priorité au pluralisme. Tout cela serait stipulé dans sa Charte nationale.
IMPLICATIONS SOCIALES D’UNE OLP REVITALISÉE
Si ces mesures sont prises dans le cadre du processus de renaissance, l’OLP pourrait jouer un rôle central dans la lutte contre la rhétorique déformante et fragmentaire entourant l’histoire, la géographie, l’identité nationale, le patrimoine et la lutte pour la libération de la Palestine. Elle pourrait impulser des contre-récits unificateurs, et soutenir les Palestiniens du monde entier dans leurs efforts pour en faire autant.
Elle pourrait en outre encourager et soutenir la formation de syndicats, d’associations profession- nelles et de fédérations de femmes et de jeunes, et favoriser leur participation aux délibérations nationales, en particulier sur les stratégies de résistance au colonialisme de peuplement, à l’occupation militaire, à la pauvreté, à l’état de siège et à la discrimination raciale. Dans ce cadre, l’OLP s’efforcerait de garantir le droit de chaque communauté palestinienne à adopter la stratégie de résistance de son choix, tant qu’elle n’entre pas en conflit avec la charte de l’OLP, la lutte collective pour la libération ou les valeurs de liberté, d’égalité, de justice et de droits humains.
Si l’Autorité palestinienne (AP) est maintenue, l’OLP doit veiller à ce que ses institutions fournis- sent des services de base (éducation, santé, eau et électricité, infrastructures) en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est et à Gaza. Pour ce faire, il faudrait reconfigurer les tâches de l’AP, conformément à une nouvelle vision qui la rende responsable devant l’OLP et qui l’empêche de supplanter ou de marginaliser les institutions de l’OLP revitalisée. De même, l’OLP doit empêcher l’inflation bureaucratique, le clientélisme et la culture de la rente dans toutes ses institutions.
CONCLUSION
Pour réussir à relancer l’OLP, le processus doit être démocratique, représentatif, participatif, transparent et inclusif. Une OLP renaissante a le potentiel de favoriser l’autodétermination et l’interdépendance entre les différentes compo- santes de la communauté palestinienne. Elle pourrait également soutenir leurs stratégies pour obtenir la libération, tant que celles-ci s’alignent sur la vision unificatrice de l’organisation. À ces conditions, une OLP renaissante pourrait ouvrir la voie à une société palestinienne plus prospère, plus équitable et plus unifiée.
Traduit et édité par Gregory Mauzé et Ouardia Derriche. Analyse originale parue sur al-shabaka.org, le 21 novembre sous le titre « Revival of the PLO: Society ».