Intervention de Michèle Sibony au colloque du CVPRPO (Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche Orient) qui s’est tenu le 16 novembre au Sénat français, sur le thème “Israéliens et Palestiniens ensemble contre l’Apartheid”
L’UJFP est une association juive née lors de la première Intifada pour soutenir les conditions d’une paix juste et durable en Israël/ Palestine, Nous avons dès le début de la deuxième Intifada été cofondateurs du Collectif National pour une Paix Juste entre Israéliens et Palestiniens. Ce collectif unique en son genre en Europe réunissait et réunit encore près de 50 associations partis syndicats. Nous sommes aussi membres de la Plateforme des ONG pour la Palestine, et aussi inscrits dans la lutte contre le racisme en France : antisémitisme, islamophobie bien sûr, et aussi négrophobie romophobie, racisme anti-asiatique à travers des plateformes comme celle de Rosa Parks et celle pour un espace antiraciste respirable. Cette précision n’est pas hors sujet, j’y reviendrai. Nous sommes tous et toutes ici présents concernés par le sort de la Palestine et l’avenir des Palestiniens comme celui des juifs israéliens qui vivent sur le territoire de la Palestine historique. Je voudrais ici évoquer rapidement à travers l’évolution de notre association les questions qui parfois divisent le mouvement de solidarité avec la Palestine. Divisions qui peuvent nuire à l’avancement de la question palestinienne en France.
Nous sommes tous et toutes informé.es quotidiennement de ce qui se passe dans cette région. Et nous sommes tous et toutes membres à un titre ou un autre du mouvement de solidarité international qui s’intéresse à ce que l’on appelle encore à tort le conflit israélo-palestinien. Une appellation qui reflète bien le point de vue occidental sur la réalité fort différente expérimentée dans la région.
1 – la naissance de l’UJFP en avril 1994 inscrivait de fait son travail dans le cadre d’Oslo, jusqu’à la deuxième Intifada. Dans ce cadre nous luttions pour la création d’un état palestinien aux côtés de l’état israélien avec Jérusalem capitale partagée selon la formule de l’époque. Cet horizon a changé avec l’échec d’Oslo dès 2000. Notre association a grandi avec la 2ème Intifada, et la question du sionisme qui était posée dès la création de l’association, car pour nous il n’a jamais ni avant ni après Oslo pu être question de deux états ethniques ou religieux, mais de deux états s’il le fallait, de tous leurs citoyens. En deux mille pourtant nous nous déclarions « non sionistes » et non « antisionistes », parce que nombre de nos membres considéraient que l’appellation d’antisioniste nous couperait définitivement de la communauté juive, et espéraient encore que nous puissions travailler en relation avec cette communauté. Notre éviction du collectif des associations juives laïques, en raison de notre non-sionisme, a mis un premier coup à cette illusion. La hargne de la communauté sioniste à notre égard, son refus de tout débat, ses violences verbales et parfois physiques via la LDJ, ont achevé le travail. Nous nous sommes rendu compte que pour être écoutés il fallait être entendus et pour cela que notre voix grandisse. Cela a été le cas à plusieurs reprises, nous avons pu le vérifier avec des lettres de radio J qui nous étaient adressées pour commenter nos déclarations, une lettre du rabbinat, certains communiqués du CRIF répondant aux nôtres ligne à ligne sans jamais les citer bien sûr.
Nous avons parfois été surpris de réactions négatives à notre égard par des pans du mouvement de solidarité nous jugeant trop radicaux. Le sionisme n’était pas une question, la seule question qui comptait était celle du droit international. Celui là même qui imposa la partition de la Palestine mandataire, et s’est avéré depuis impuissant (mais est-ce bien le terme peut être faut-il dire sans volonté de) à imposer un état Palestinien. Le soutien du droit international partitionniste renouvelé à la baisse avec Oslo est en réalité un soutien à l’existence de l’état israélien. Ceux là même qui s’offusquent aujourd’hui de la loi état-nation, en attribuant uniquement à l’extrême droite israélienne au pouvoir la responsabilité de l’état-nation du peuple juif, semblent avoir oublié que cet état-nation exclusivement juif est inscrit dans la déclaration d’indépendance de 1948. Une partie du mouvement de solidarité s’exprime encore aujourd’hui contre la dérive extrême droitière des gouvernements de ce régime, mais semble ignorer que c’est la gauche sioniste qui est la grande responsable de l’installation de ce régime colonial et de la Naqba. De 1948 à 1974, 17 gouvernements Mapaï travaillistes se sont succédés sans interruption, responsables d’expulsion de massacres, de guerres, de l’occupation et de la colonisation de Gaza et de la Cisjordanie. La gauche israélienne, ou ce qu’il en reste, est restée attachée aux paramètres d’Oslo périmés depuis plus de vingt ans et qui sont directement responsables de la loi état nation. Il faut reconnaître que « deux peuples deux états » était un slogan de la paix maintenant, hérité du droit international, un slogan raciste fondé sur la conception ethnique de la nation qui s’affirme aujourd’hui. De même le « eux chez eux, nous chez nous », et encore le fameux et fumeux « divorçons en paix » sans oublier que le mur de séparation est leur idée.. Autant de slogans et d’actes qui conduisent directement et concrètement à l’apartheid d’aujourd’hui. Le sionisme ne commence pas avec la loi état nation ou plutôt le sionisme se fonde depuis son tout début sur l’idée d’un état nation du peuple juif, inscrite dans la déclaration d’indépendance de l’État du 15 mai 1948.
…« C’est de plus, le droit naturel du peuple juif d’être une nation comme les autres nations et de devenir maître de son destin dans son propre État souverain.
En conséquence, nous membres du conseil national représentant le peuple juif du pays d’Israël et le mouvement sioniste mondial, réunis aujourd’hui, jour de l’expiration du mandat britannique, en assemblée solennelle, et en vertu des droits naturels et historiques du peuple juif, ainsi que de la résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies, proclamons la fondation de l’état juif dans le pays d’Israël, qui portera le nom d’Israël ».
Qui est ce « nous » qui institue le peuple dans cette déclaration ? Cette déclaration dit quel collectif constitue la nation et transforme la société coloniale juive en collectif national, à l’exclusion des Palestiniens. Nous sommes en 1948 en pleine Naqba, les Palestiniens qui demeurent en Israël, n’auront jamais accès à la Nationalité, tout juste à une Citoyenneté de plus en plus limitée et de plus en plus controversée…
Sans parler de près de 70 lois discriminatoires, votées depuis 1948, excluant la population palestinienne restée sur le territoire israélien de tous les symboles nationaux, de la terre, etc.
Attaquer la loi Etat-nation est bien sûr notre devoir, mais en la situant sans jamais l’oublier dans le droit fil du sionisme auquel elle appartient. Sauf à distordre gravement la réalité. On pourrait à lire certains textes imaginer que si demain la gauche sioniste (mais où est-elle passée d’ailleurs) revenait au pouvoir les choses iraient mieux pour les Palestiniens.. elle qui Naqba incluse est responsable de l’annexion de Jérusalem, de la conquête et de la colonisation des territoires occupés de 67 des nombreux massacres à Gaza…. Cette loi n’est -elle pas l’occasion pour les mouvements de solidarités dans le monde de questionner enfin, au delà de toutes les mythologies et les fabrications d’opinion imposées, la réalité du régime qui détruit la Palestine ? Lutter contre l’apartheid, fruit d’une situation coloniale, n’est ce pas d’abord lutter contre le régime qui l’installe ? Et le dernier gouvernement de ce régime n’est de loin pas le seul responsable de cette mise en place.
Le régime qui opprimait les noirs d’Afrique du sud s’était donné un nom : l’Apartheid. Le régime qui détruit la Palestine s’est donné un nom : le Sionisme. Lutter véritablement contre l’apartheid israélien aujourd’hui n’est ce pas enfin l’appeler par son nom et lutter contre le sionisme ? Mal nommer ou ne pas nommer ce régime c’est contribuer aux malheurs de la Palestine, pour paraphraser Camus. Nous sommes à la veille de l’examen par l’assemblée nationale de l’amendement Maillard qui vise à identifier l’antisionisme à une forme d’antisémitisme. Ne peut-on penser que si depuis longtemps en France toutes les organisations partis syndicats fédérations d’enseignants associations des droits de l’homme avaient eu le courage d’appeler les choses par leur nom, et de condamner fermement le sionisme, la situation serait différente aujourd’hui et aurait rendu plus difficile une telle proposition à l’assemblée nationale ? Il n’est pas trop tard mais se contenter d’évoquer la liberté d’expression, même si c’est juste et nécessaire, ne suffira pas pour contrer cette attaque si dangereuse pour tout le mouvement de solidarité et faut-il le rappeler pour la Palestine elle-même.
Ne faudrait-t-il pas au contraire prendre conscience et affirmer que ce qui réveille ou provoque l’antisémitisme dans le monde aujourd’hui c’est le soutien accordé au régime sioniste. Et cet antisémitisme nourrit et renforce le sionisme.
Les soutiens du mouvement de solidarité :
Le fait que Netanyahu vienne de reconnaître son inaptitude à constituer un gouvernement et que ce soit Gantz qui remonte en scène pour le faire ne devrait pas nous aveugler : présenté en Europe comme centriste ou même centre gauche, reconnu centre droit en Israël, ce qui est encore une litote, sur la question sécuritaire et donc palestinienne Gantz a sensiblement les mêmes positions que Netanyahu. L’homme qui se vante d’avoir ramené Gaza à l’âge de pierre en 2014, n’a cessé de donner des cautions anti-palestiniennes afin de répondre à la principale accusation de Netanyahu contre lui : celle d’une proximité d’avec les arabes. « lo Bibi, Tibi » c’est-à-dire : Gantz ne soutient pas Netanyahu il soutient les arabes. La décision de la liste arabe unie à l’exception notable des députés de Balad, de soutenir la candidature de Gantz contre Netanyahu a rencontré la colère palestinienne de Gaza et des TOP. De fait cette décision participait de la fragmentation de la Palestine.
Le fait qu’une partie du mouvement de solidarité français a pu saluer cette décision de la liste unie de soutenir la candidature de Gantz est très problématique. Si le mouvement de solidarité comme il l’affirme en général apporte son soutien à la société civile palestinienne, il devrait en particulier veiller à ne pas soutenir tout ce qui peut contribuer à la principale calamité imposée aux Palestinien : la fragmentation de leur peuple. L’illusion d’une alliance avec Gantz a d’ailleurs trouvé ses limites dans le mépris affiché de Gantz à leur égard, et encore plus aujourd’hui avec la nouvelle attaque sur Gaza chargée de déterminer qui dirigera le prochain gouvernement israélien ; le plus cruel et le plus agressif sera celui-là, et Gantz jouera tous ses atouts comme chef d’état major du précédant carnage en 2014.
Le mouvement de solidarité devrait aussi favoriser tout ce qui dans la société palestinienne peut permettre la reconstruction d’une stratégie globale. Il ne devrait pas s’agir d’un soutien inconditionnel aux autorités qui n’ont plus de légitimité des urnes aujourd’hui, ni même celle de la rue palestinienne, et qui placent depuis Oslo la construction de l’état en objectif et l’horizon national unique. Comme le développe Joseph Massad dans son article de 2012 « la compulsion de partition », Oslo a transformé la lutte de libération nationale en lutte pour la construction d’un Etat.
Le peuple palestinien depuis et à cause d’Oslo a perdu sa capacité à construire une stratégie nationale globale. Reste que la société civile palestinienne a construit et proposé un outil politique le seul, capable de lutter contre cette fragmentation, de mobiliser et d’unifier la solidarité internationale quelle que soit les divergences politiques.
Alors je poserai la question suivante : celle du BDS
Pour nous, dès sa sortie en 2005, il était évident de soutenir l’appel au boycott désinvestissement sanctions contre Israël. Et nous avons participé à la construction de la campagne BDS France en 2009 dans laquelle nos militants tiennent tous une place active. Nous nous étonnons souvent des frilosités qui se sont exprimées et s’expriment toujours au sein du mouvement de solidarité français sur le BDS. Boycott seulement des colonies, réticences sur le boycott culturel, voire refus de tout boycott, ces réticences ont amené nombre d’associations à ne s’opposer aux tentatives de criminalisation ou de l’interdiction qu’en usant de l’argument de la liberté d’expression. On peut imaginer qu’il aurait été bien plus difficile aux gouvernements successifs de céder aux pressions du lobby israélien si nous avions eu un front uni et déterminé soutenant expressément le boycott des institutions de l’apartheid, de toutes les institutions de l’apartheid. Car c’est bien de cela qu’il est question. Pourquoi l’appel palestinien du BDS continue-t-il de diviser Nos rangs et d’y susciter tant de frilosité avec quelles conséquences, sachant qu’il s’agit de l’outil majeur de la résistance non armée palestinienne ? Parler de la liberté d’expression concernant BDS est une façon à peine dissimulée de se défausser sur la vraie question : le soutien franc massif et sans réserve qui devrait être accordé au BDS en France. La partie du mouvement de solidarité qui défend la liberté d’expression pour le BDS tout en spécifiant « que l’on soit pour ou contre » passe en fait le message qu’elle est pas d’accord avec le BDS, mais défend juste le droit qu’il soit exprimé. Très faible niveau de soutien donc, dès lors que c’est ce point qui est mis en avant. Cela fragilise le mouvement du BDS en France, malgré sa combativité, et cela réduit le niveau de pression nécessaire sur l’UE pour qu’elle sanctionne enfin Israël. L’amendement Maillard dont je viens de parler vise aussi quasi explicitement la campagne BDS.
Cette bataille qui se mène sans défaillance dans le camp de nos adversaires contre la Palestine, rencontre encore trop d’indétermination dans notre camp.
La Partition et l’État de Palestine
L’évolution de notre association a accompagné la réalité brutale de la situation du terrain. Confiscation continue des territoires de Cisjordanie, Blocus de Gaza détachée de la Palestine par la stratégie israélienne largement partagée par les puissances occidentales, Jérusalem consacrée capitale d’Israël par les Etats Unis, une souveraineté israélienne toujours plus prégnante sur l’ensemble de la Palestine historique, la fragmentation encore des statuts des Palestiniens, l’ « oubli » trop fréquent de la revendication du droit au retour des réfugiés même dans nos rangs, tout cela nous a conduit, avec la lecture de nombreuses expressions palestiniennes, à revenir sur ce qu’Oslo avait tenté d’imposer et s’est avéré comme un dangereux leurre. Amjad Iraqi un chercheur palestinien cite utilement dans un article de 2018 (Éléments d’un récit et d’un discours palestiniens stratégiques – Al Shabaka) les distorsions du récit palestinien dues à l’adoption du récit israélien.
« Jamil Hilal a identifié cinq « fausses représentations » qui infestent le discours dominant qui règne aujourd’hui sur la Palestine : (1) les droits territoriaux des Palestiniens ne sont limités qu’à 22% de leur patrie historique ; (2) le point de départ de la lutte palestinienne est 1967, au lieu de 1948 ou avant ; 3) le peuple palestinien ne comprend que les habitants de la Cisjordanie et de la bande de Gaza ; (4) la solution des deux États constitue l’avenir politique le plus légitime et le plus viable des Palestiniens ; et (5) que les Palestiniens puissent développer leur société et leurs institutions tout en vivant sous occupation militaire. »
A cette lecture on peut légitimement se demander si certaines de ces « fausses représentations » n’ont pas aussi été adoptées par une partie du mouvement de solidarité.
La gauche française est trop souvent très heureuse de se référer au droit international et au partage de l’ONU. Ce même partage repris par Oslo en 1993, après un demi siècle de destruction et de colonisation de la Palestine qui tente de faire exister un état sur les restes de ces cinquante années : les territoires occupés de 67 et Gaza. Oslo auquel on continue encore et encore de se référer est aussi un échec, le second du droit international partitionniste. Joseph Massad évoque ce moment et ses conséquences dans l’article précité : « Ce n’est pas le rejet du plan de 1947 qui constitue l’événement traumatique des Palestiniens, mais bel et bien leur acceptation de sa version tronquée en 1988. Loin d’être une névrose, le rejet palestinien du plan de partition reflétait une position de principe anticolonialiste partagée par tous les peuples colonisés »s…a compulsion de Partition né« La partition a constitué le critère à la base de ces projets (coloniaux) dans tous ces contextes (le nom même de cette stratégie en Afrique du Sud fut “partition” ou “apartheid”) et l’arrêt de la partition est considéré comme la seule voie vers la libération. Sauf en Palestine où la partition est présentée comme le moyen non pas de renforcer le projet sioniste de colonisation de peuplement, mais, étonnamment, comme une voie vers la “libération” ». Ceux qui balaient d’un coup d’épaule méprisant la perspective d’un état de la mer au Jourdain avec le retour des réfugiés palestiniens, comme une utopie, devraient commencer par balayer devant leur porte : la fameuse solution à deux états vieille de 72 ans d’expérimentation se solde par un échec magistral, alors que celle d’un seul état n’a jamais été tentée à ce jour.
Sans doute est-ce aussi ce qu’exprime le peu de soutien trouvé en Europe à la grande marche du retour de Gaza. Ceux là encore devraient écouter Richard Falk qui a été rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme (et ce n’est pas un utopiste) dans son article tout récent du 7 novembre 2019 : « Les manœuvres de zombies de ces 20 dernières années ou plus et le plaidoyer constant en faveur de négociations pour une solution à deux états depuis longtemps moribonde doivent cesser : la seule question qui vaille est de savoir quel type d’État émergera – laïc ou d’apartheid…soit un état juif pratiquant l’apartheid, soit un état laïc, ethniquement neutre fondé sur les droits de l’homme et l’égalité pleine et entière de ses différents peuples et de leur religion. L’adoption récente de la Loi Fondamentale du peuple juif, et le rejet par la Knesset d’un projet de loi affirmant l’égalité de tous les peuples vivant en Israël, montrent clairement qu’Israël est déterminé à réaliser la première option… En fin de compte, la seule question qui vaille est la suivante : quel type d’état unique existera dans le territoire de la Palestine administré entre les deux guerres mondiales par le Royaume Uni en tant que mandataire ? Est-ce que ce sera un état juif qui réalise le projet sioniste, ou un état laïc fondé sur les droits de l’homme et mû par un esprit d’égalité ?
Et il conclut : Le contexte diplomatique y gagnerait en clarté si le président Mahmoud Abbas et la direction de l’AP à Ramallah pouvaient, même tardivement, montrer la voie en affirmant ce nouveau réalisme. Ce pourrait être le moyen de retrouver leur pertinence pour le bien-être du peuple palestinien et la véritable dynamique de la lutte palestinienne. »
L’UJFP soutiendra toujours le droit palestinien à l’autodétermination, mais elle ne peut que constater à quel niveau de destruction de la Palestine a conduit le droit international et sa logique de partition qui n’a réalisé que la seule expansion et le seul développement du seul état existant : Israël dans une logique de destruction et d’élimination de la Palestine. Ce qui sous tend les partitions dans le monde est un principe d’inégalité (des ressources, des individus des états constitués etc. Voir encore l’Apartheid sud africaine)
En conclusion, je dirais que le peuple palestinien dans la survie a besoin aujourd’hui d’amis inconditionnels qui n’atermoient pas autour de ce qui est pour lui vital :
- La condamnation ferme et publique et non implicite de ce qui est entrain de le détruire : le sionisme
- L’adhésion ferme et entière à ce qui le défend et le protège aujourd’hui : le BDS entre autres.
Et parce que l’UJFP ne dissocie pas son action dans le cadre de la globalisation du monde qui relie et intrique les situations, parce que nous avons vu comment l’idéologie néoconservatrice a forgé des liens maléfiques entre la résistance palestinienne et le terrorisme islamiste, entre le terrorisme islamiste et les populations musulmanes françaises notamment, parce que la situation de la Palestine est aujourd’hui noyée dans le Moyen Orient en fusion, nous faisons le lien avec l’islamophobie qui se développe en Europe et en France, avec l’importation des méthodes de gouvernance israéliennes, et de gestion des populations, et nous nous impliquons dans la défense des victimes de l’islamophobie.
Là aussi les atermoiements nous semblent dangereux pour la population visée ici, qu’ils isolent dans la revendication antisioniste légitime, permettant qu’elle soit stigmatisée comme illégitime et antisémite. (Rappelons nous que déjà en 2014 l’académie de Poitiers considérait que l’intérêt pour la Palestine constituait un signe de radicalisation et ce signe s’est propagé et répété dans nombre de listes destinées à ce repérage. N’est-il pas temps de construire un mouvement de solidarité véritablement inclusif ? Nous l’avons vu et vécu à plusieurs reprises, les appels à manifestation ne sont pas soutenus par un collectif national qui craint de donner un cadre nécessaire entre autres à des forces vives de la population qui sont antisionistes, qui soutiennent les Palestiniens réfugiés, de Gaza, de Cisjordanie et d’ailleurs comme on soutient un membre de sa famille, parce qu’elles sont arabes et refusent à juste titre l’injustice. Ne pas leur offrir le cadre nécessaire à l’expression de la solidarité c’est les mettre en danger, les livrer en proie aux pires forces réactionnaires et racistes de ce pays. N’est ce pas œuvrer ici contre le vivre ensemble et la coexistence que l’on prétend soutenir ailleurs ? Comment conclure sans évoquer Gaza sous le feu israélien aujourd’hui, et la solidarité qui devrait s’exprimer dans la rue, et comment ne pas constater aujourd’hui que le Collectif National ne s’est pas encore réuni pour organiser d’urgence la grande manifestation qui devrait s’imposer, et la communication nécessaire ? Encore faudrait-il cesser enfin d’avoir peur des arabes ici pour soutenir ceux de là bas.
Amjad Iraqi pose dans sa conclusion des questions utiles destinées aux Palestiniens, mais qui nous concernent aussi et peuvent nous aider à dessiner notre soutien et nos mobilisations :
“– Quelles composantes et priorités d’un récit commun peuvent être approuvées par tous les secteurs de la société palestinienne ?
– Les Palestiniens doivent-ils s’entendre sur le « but final » de notre lutte afin de construire et de maintenir un récit unifié ?
– Comment assurer l’efficacité stratégique de notre discours sans le rendre étroit ou exclusif ?
– Notre discours va-t-il revenir aux modèles traditionnels du nationalisme ou peut-il trouver de nouveaux cadres pour réunir les communautés palestiniennes fragmentées ?
– Notre récit peut-il donner la priorité à ce que nous combattons – le colonialisme des colons israéliens et l’apartheid – alors que notre discours se concentre sur une vision de ce que nous voulons – la liberté, la justice et l’égalité ?
– Reconnaître le droit d’Israël à exister (comme cela a été le cas dans les accords d’Oslo) implique-t-il l’acceptation du récit et du discours sionistes ?
– Comment le récit et le discours palestiniens devraient-ils aborder les droits historiques et contemporains des juifs israéliens dans une vision politique future ?
Ce sont quelques-unes des questions auxquelles les Palestiniens mais aussi leurs alliés doivent répondre, en partageant les expériences et les leçons tirées d’autres luttes.”
http://www.ujfp.org/spip.php?article7514