Modeste témoignage d’un simple citoyen lors d’une Mission d’observation en Palestine

mission-avril-2011-045Du 10 au 17 avril dernier, une mission d’observateurs organisée par l’Association Belgo-Palestinienne était de visite à Jérusalem et en Cisjordanie. Un des participants témoigne.

7 jours en Palestine

A Jérusalem, nous sommes sur le terrain avec B’tselem (ONG israélienne de défense des droits de l’Homme) : exposé sur le Mur et les confiscations de terres.
Avec l’AIC (Alternative information center), nous observons la réalité des colonies autour de Jérusalem et recevons des informations sur la politique de ségrégation et de restrictions pratiquée par Israël. Nous rencontrons aussi le Consul belge à la Délégation européenne chargée de la Palestine. Devant lui, nous soulignons la passivité de l’Europe et la timidité de ses déclarations et abordons le problème des accords d’association et celui de l’exportation frauduleuse en Europe par Israël de produits provenant des territoires occupés. Le rapport des Consuls très critique sur Israël est également évoqué. Je regrette les réponses laconiques et peu convaincantes qui nous sont apportées.

Visite de Silwan (Sud de Jérusalem-Est) et de Sheikh Jarrah (Nord de Jérusalem-Est), emblématiques de la politique de colonisation sournoise mise en œuvre par Israël. Ces quartiers font partie très clairement d’un plan de déconnexion de Jérusalem-Est du reste du territoire palestinien.

A Beit Ummar, un comité populaire nous expose son combat non violent contre l’occupation et la colonisation. Quant à Daoud Nassar  du centre « Tent of Nations » à Bethléem et l’Organisation « Union of Agricultural Workers Centers » d’Hébron, ils nous expliqueront le leur dans un enfer similaire. A Bethléem, Najji Odeh nous accompagne dans une visite du camp de réfugiés de Deheisheh

A Hébron, rencontre avec le TIPH (Temporary International Presence in Hebron). Aujourd’hui, 500 colons religieux fanatiques vivent dans divers endroits de la vieille ville, rendant la vie des Palestiniens très difficile. Gravitent autour de la ville 7.000 autres colons. Nous procédons à une visite affligeante de la vieille ville.

A Ramallah, rencontre avec « Defence of Children International » et découverte du deux poids-deux mesures de l’administration israélienne à l’égard des enfants palestiniens : ainsi, l’âge de majorité d’un Palestinien est de 16 ans contre 18 ans pour un Israélien; la durée maximale de garde à vue avant tout contact avec un avocat est de 90 jours pour un Palestinien contre 2 jours pour un Israélien.

A l’école du cirque de Ramallah, une Belge, Jessica Devlieghere, nous présente le travail admirable qu’elle réalise avec son époux et les enfants palestiniens. Rencontre avec des étudiants de l’Université de Birzeit sous occupation.

Dans la Vallée du Jourdain, région stratégique, nous rencontrons sur le terrain Fathi Khdeirat, dirigeant de la «  ordan Valley solidarity ». En 1967, la population palestinienne dans la vallée comptait 320.000 habitants ; aujourd’hui, elle n’en compte plus que 56. 000. Les 9.400 colons de la vallée consomment 6,6 fois plus d’eau que les 56 000 Palestiniens qui doivent en acheter aux Israéliens.

« Pourquoi aller en Palestine ? Est-ce bien raisonnable ? »

Pour tenter d’approcher, espérer saisir l’occupation avec ses implications dans la vie quotidienne des Palestiniens.  Au-delà des lectures, des articles, des rapports, des documentaires, des polémiques, des politiques et des diplomaties, j’ai décidé de participer à cette mission d’observation organisée par l’ABP pour rencontrer des hommes et des femmes, simplement des personnes qui semblent être prises au piège d’une machine infernale, une malédiction peut-être, mais qui pourtant résistent au désespoir par le simple fait de continuer à vivre là où ils sont.  Malgré tout : le fractionnement, le démembrement de leur territoire, de leurs villages, de leurs quartiers, de leurs familles, de leurs vies, de l’image qu’ils ont d’eux même et de l’avenir.  Fractionnement qui se traduit par le mur condamné par la cours de justice internationale, par les points de passages contrôlés, par les cartes de résidences restrictives, par l’extension folle, irrationnelle des colonies, par le blocage de routes, par les blocs de bétons sur lesquels on peut lire « zone de tirs » à l’attention des paysans leur interdisant d’accéder à leurs terres, par la confiscation de l’eau et de territoires agricoles au profit de colons, par la destruction d’habitations « non autorisés ».

Certains considèrent que le conflit israélo-palestinien ne les concerne pas. Que le conflit israélo-palestinien est loin d’être le plus atroce.  Pourquoi donc se focaliser ainsi sur celui-ci plutôt qu’un autre?

Pour ma part,  je suis conscient du fait d’être, de facto, impliqué, en tant que citoyen européen, dans ce conflit par le simple fait des accords d’associations UE/Israël permettant à Israël d’exporter vers l’UE, sans s’acquitter des droits de douanes, les produits agricoles provenant des territoires qu’elle occupe et colonise illégalement en Palestine.  L’Europe est par ailleurs le premier partenaire commercial d’Israël.  N’y a-t-il pas des raisons de s’interroger quant à la moralité des liens privilégiés qu’entretient l’Europe avec un Etat qui ne respecte pas les principes universels des droits de l’homme sur lesquels les accords d’associations sont pourtant fondés?

Le conflit israélo-palestinien n’est pas le plus meurtrier, en effet,  mais comment expliquer les retentissements de ce conflit à travers le monde entier autrement qu’en considérant que cette colonisation est emblématique d’un monde révolu qui a fait tant de malheur dans les siècles passés, que les populations du monde sont conscientes que la communauté internationale a une responsabilité dans cette situation (la création d’Israël grâce aux Nations-Unis a aggravé et engendré de multiples problèmes qui ont abouti à la situation absurde que l’on connaît).  Il s’agit d’essayer d’agir là où on pense qu’on peut faire évoluer les choses.  Compte tenu de la relation privilégiée que l’Europe, entretient avec Israël, nous avons, en tant que citoyens européens, une responsabilité morale, de condamnation et d’action pour dénoncer l’impunité avec laquelle Israël viole les droits de l’homme, le droit international et une multitude de résolutions des Nations-Unies.  Adopter une position ferme contre les violations des droits de l’homme, contre l’occupation et contre la colonisation illégale de territoires, voici ce que j’estime être la responsabilité de tout citoyen doué d’humanité.

On m’a aussi fait la réflexion suivante : « on ne peut considérer les souffrances des Palestiniens sans considérer aussi la situation des Israéliens et leurs craintes pour leur sécurité ».

Il faut comprendre que pour expliquer ses abus, ses crimes, ses multiples violations et ses guerres, Israël véhicule l’image où il est entouré de pays hostiles, menaçant sa population et même son existence.  Cette image est fausse.  Dans les faits, il faut bien admettre qu’Israël est bien plus en sécurité que la plupart des pays de la région dont les populations ont le sentiment qu’Israël est la principale menace. Tout le monde est pourtant unanime sur le fait qu’Israël doit jouir des mêmes droits que tout autre pays dans le système international.  Mais Israël refuse de se soumettre aux mêmes obligations et poursuit ses exactions en toute impunité.  Quand les Israéliens réaliseront-ils que les politiques menées par leurs gouvernements ne peuvent conduire qu’à la paranoïa et à l’absurdité avec des conséquences dramatiques prévisibles pour tous?

Ce conflit est-il si complexe ? Si on s’attarde aux faits, pas aux discours, ni aux intentions déclarées ou supposées mais uniquement aux faits, les principaux aspects de ce conflit sont évidents et accessibles à toute personne qui les analyse en toute conscience.  Rien de complexe, rien qui soit sujet à interprétation, ou à débats, simplement des faits. Il ya des choses fondamentales qu’il convient de garder à l’esprit: la violence vient d’abord et avant tout de l’occupation.  Cette occupation doublée d’une colonisation illégale perpétue le conflit et éloigne la perspective d’une solution à deux Etats.  De plus les efforts déployés par Israël pour se définir comme Etat juif auraient, s’ils devaient aboutir, des conséquences désastreuses pour les minorités non juives qui vivent déjà dans des conditions difficiles en Israël.  Israël ne serait plus le pays de tous ses citoyens mais exclusivement celui des Juifs.  Il faut s’attendre à ce que le refus des Palestiniens sur ce point inacceptable soit exploité pour éloigner davantage d’hypothétiques négociations de paix.  Par ailleurs, il faut être conscient que des négociations ne peuvent être menées sans un organe d’arbitrage garant des droits de chacun.  La communauté internationale pourrait imposer sa présence sur le terrain pour garantir la paix.  Elle n’a pas attendu que l’Irak et le Koweït se mettent autour de la table pour trouver un accord, une intervention a pu avoir lieu en urgence.  Les Etats-Unis ont un rôle majeur dans le conflit israélo-palestinien.  Même une légère modification de leur soutien à Israël pourrait peser de façon décisive vers une solution de paix équitable et donc durable.

Cette mission m’a permis d’approcher la réalité de l’occupation et de la colonisation israélienne.  Elle aussi m’a permis de comprendre pourquoi selon les normes de la Cour pénale internationale, la colonisation représente un crime de guerre.

A mon retour, en embrassant mes enfants, je ne pus m’empêcher de penser à une question surprenante que m’avait posée l’un d’eux âgé à l’époque de cinq ans : « dis papa est-ce qu’il y a encore des lions ? ».  Oui mon enfant, il en subsiste encore dans certaines réserves, je ne sais pour combien de temps encore…

Allons-nous sortir de notre réserve ?

Adam D.

Bruxelles 09/05/2011


« Israël a en conséquence l’obligation de cesser immédiatement les travaux d’édification du mur qu’il est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est. De l’avis de la Cour, la cessation par Israël des violations de ses obligations internationales implique le démantèlement immédiat des portions de cet ouvrage situées dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est. L’ensemble des actes législatifs et réglementaires adoptés en vue de l’édification du mur et de la mise en place du régime qui lui est associé doivent immédiatement être abrogés ou privés d’effet, sauf s’ils demeurent pertinents dans le contexte de l’obligation de réparation à laquelle Israël est tenu. [ …] L’édification du mur qu’Israël, puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, et le régime qui lui est associé, sont contraires au droit international » Avis consultatif de la Cours international de justice de La Haye – 9 juillet 2004.

En violation de la résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations-Unies.

En violation des résolutions 446 et 452 du Conseil de sécurité des Nations-Unies.

L’article 2 de l’accord précise « les relations entre les parties, de même que toutes les dispositions du présent accord, se fondent sur le respect des principes démocratiques et des droits de l’homme fondamentaux énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (…) ». L’article 79 indique: « Si une partie considère que l’autre partie n’a pas satisfait à une obligation découlant du présent accord, elle peut prendre les mesures appropriées. (…) ».

Au moment des atrocités commises par Israël lors de l’opération « Plomb durci » (qui a tué  selon Amnesty International 1400 Palestiniens dont environ 300 enfants et civils non armés, y compris 115 femmes et quelque 85 hommes de plus de 50 ans), entre le 27 /12/2008 et le 18/01/2009, des manifestations monstres ont eu lieu à travers le monde entier jusqu’en Amérique du Sud en passant par l’Extrême Orient.

Sondage publié sur le site brookings.edu  (http://www.brookings.edu/reports/2010/0805_arab_opinion_poll_telhami.aspx)

Disponibles sur des sites comme www.ochaopt.org, www.btselem.org  ou www.amnesty.org.

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