Le cyclisme, nouveau créneau de propagande israélienne

Ces dernières années, un intense sportwashing cible la petite reine afin de réhabiliter l’image d’Israël.

Par Ben Peeters

Article à paraître dans le numéro 86 du bulletin Palestine (décembre 2020)

 Les classiques printanières et les grands tours n’ayant pu se dérouler à leurs dates initiales, toutes ces compétitions ont été concentrées début août à fin novembre. Cette année, une nouvelle équipe israélienne s’est invitée sur la scène world tour et est présente au départ de la plupart des plus grandes courses du monde. C’est le milliardaire canadien Sylvan Adams qui finance principalement cette nouvelle équipe, appelée Israel-Start-up Nation, afin de contribuer, via le sport, au « rayonnement d’Israël ».

Qui est exactement Sylvan Adams ?
Sylvan Adams n’est pas là pour vous parler de guerre, d’occupation, de colonisation. Il préfère parler d’économie, de start-up, de démocratie, de tolérance et aussi du pays de son retour aux sources, Israël.

Son père, Marcel, a fui les camps de travail nazis en Roumanie, pour rejoindre la Palestine qui était alors sous mandat britannique et qu’il a ensuite quittée rapidement pour la France et puis le Québec, au tournant des années 50. Sylvan Adams est avant tout un homme d’affaires. En effet, il est alors à la tête d’un véritable empire immobilier de plusieurs milliards de dollars au Canada. C’est il y a seulement cinq ans qu’il a pris la décision de faire son Alya et de venir vivre en Israël. « Après une semaine à Tel-Aviv, le magnat a imprimé une nouvelle carte d’affaires au titre révélateur des années à venir : ambassadeur autoproclamé de l’État d’Israël. » Véritable couteau suisse du soft power israélien, quand il s’agit de redorer le blason de son pays d’adoption, Adams n’hésite jamais à sortir son chéquier.

Lionel Messi à Tel-Aviv l’année passée, c’est Adams qui était derrière. Le Giro d’Italie à Jérusalem, en 2018, c’était lui. L’arrivé du Franco-Israélien Roy Nissany comme pilote d’essai en F1 ? C’était lui aussi.

Le sport pour bâtir des ponts entre les nations ? L’idée-slogan peut paraître obsolète mais dans le cas de Sylvan Adams, la stratégie est affichée sans complexe.Lorsque le gendre de Donald Trump, Jared Kushner, présente en juin 2019 à Bahreïn le volet économique de son projet de « Deal du siècle », Sylvan Adams fait partie des hommes d’affaires conviés à l’événement.

Sur le plan sportif, il a d’abord misé sur des cyclistes européens peu connus pour former les quelques cyclistes israéliens compétitifs, dont Guy Niv en course sur le Tour 2020. Mais cette stratégie a vite montré ses limites. Il a alors ressorti son carnet de chèques pour embaucher quelques vieilles gloires du peloton, l’Irlandais Dan Martin ou l’Allemand André Greipel et pour 2021, Chris Froome, qui a été quadruple vainqueur du Tour de France mais dont les résultats cette saison ont été plus que catastrophiques. L’équipe devra sans doute se contenter de faire de la figuration sur les grandes courses une saison de plus.

Le sport pour faire oublier l’apartheid

« Alors que Chris Froome s’engage à rouler pour Israël, des colons ont attaqué des cyclistes palestiniens en Cisjordanie occupée le 18 juillet  – C’est ainsi qu’Electronic Intifada, du 23 juillet 2020, rappelle que les Palestiniens vivant sous occupation militaire israélienne ne sont pas libres, eux, de s’adonner en toute sécurité à des activités sportives dans leur propre pays.

Le gouvernement israélien trouve là une nouvelle occasion de détourner l’attention de sa politique criminelle, en particulier dans un contexte de fortes protestations après ses annonces d’annexion. Le gel provisoire de l’annexion de jure ne s’explique que par le soin qu’Israël porte à son image. En réalité, la poursuite de la colonisation de facto n’a jamais cessé, ainsi que les expropriations et les destructions de maisons palestiniennes.

Des actions en France et en Belgique

Plusieurs militants et cyclistes amateurs français ont parcouru plusieurs étapes du tour de France avant le passage des coureurs afin de dénoncer cette opération de sportwashing. Une action similaire a eu lieu en Belgique, conduite par des militants de l’Association belgo-palestinienne (voir notre reportage photo dans notre prochain numéro du bulletin Palestine à paraître fin décembre). Plusieurs militants de l’association ont bouclé le tracé de la flèche brabançonne la veille des courses professionnelles afin de dénoncer l’apartheid israélien. Un comité d’accueil militant était généralement présent lors de la plupart des courses auxquelles l’équipe d’Israël participait.

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