Les récentes avancées de la Belgique sur la différenciation ou encore le choix de Ben&Jerry’s de se retirer du territoire occupé (bulletin Palestine n°89, 3e trim. 2021) ont eu le mérite de rappeler la violation caractérisée du droit international que représente la colonisation. Il ne faudrait pas pour autant oublier que l’entreprise de dépossession et de ségrégation du peuple palestinien concerne toutes ses composantes, de part et d’autre de la Ligne verte. Aussi n’insisterons-nous jamais assez sur l’importance d’une mobilisation maximale de la société civile en faveur de la campagne Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) pour renvoyer le régime d’apartheid aux poubelles de l’Histoire.
France
C’est une expérience des plus captivantes que l’Institut du monde arabe de Paris proposait, a priori, à ses visiteurs depuis le 24 novembre : plonger dans la riche histoire plurimillénaire des Juifs d’Orient, tragiquement interrompue par la catastrophe qu’a constitué leur exil souvent forcé des pays arabes dans les années qui ont suivi la création d’Israël. Problème : cette exposition repose en partie sur une étroite collaboration avec des organismes culturels israéliens impliqués dans l’appropriation de la culture arabo-palestinienne et juive-arabe. Ce partenariat se situe explicitement par ailleurs dans la dynamique de normalisation entre Israël et plusieurs pays arabes, chaudement saluée par le président de l’Institut et les organisateurs de l’exposition, visiblement peu soucieux du sort des Palestinien·nes, grand·es oublié·es de ce processus. En réaction, une centaine d’intellectuel·les et d’artistes se sont fendu·es d’une lettre appelant l’Institut à revenir sur ses déclarations accusées de banaliser l’apartheid israélien. Et les auteurs de mettre en parallèle le nettoyage ethnique des Palestiniens avec le processus de dépossession culturelle de ses nouveaux arrivants mizrahim : « la culture des Juifs arabes fait partie intégrante de la culture arabe et la couper de ses racines est la négation d’une partie de la mémoire et de l’histoire arabes. »
Israël
Un évènement passionnant et culturellement riche se tiendra mi-décembre 2021 en Israël : Miss Univers 2021. C’est à Eilat, à l’extrême sud d’Israël au bord de la mer Rouge, que l’État israélien, au travers d’une brillante stratégie de propagande, redorera son image sur la scène internationale. C’est (encore et toujours ?) l’État sud-africain qui fait part de sa grande clairvoyance vis-à-vis de la hasbara. Si la candidate sud-africaine Lalela Mswane participera bien au concours, l’État sud-africain lui a, quant à lui, retiré son soutien ainsi qu’au concours Miss Afrique du Sud. En effet, les négociations entre le gouvernement et les organisateurs du concours n’ont pu aboutir au retrait de la candidate sud-africaine. Dans sa tentative d’explication des conséquences d’une participation sud-africaine, l’État sud-africain a rappelé aux organisateurs les mots de Desmond Tutu après sa visite en Israël : “Tous les Sud-Africains noirs sont familiers de leur humiliation, eux qui ont été contraints, harcelés, insultés et attaqués par les forces de sécurité du gouvernement d’apartheid.” Le parallèle est fait. Rien à ajouter.
Irlande
Au rayon des bonnes nouvelles, notons le geste fort posé par l’écrivaine irlandaise Sally Rooney pour marquer sa solidarité avec le peuple palestinien. Devenu en trois jours le roman le plus vendu en Irlande en 2021, les traductions se multiplient pour faire voyager son dernier ouvrage : “Beautiful World, Where are you”. La romancière a refusé de vendre les droits de traduction à un éditeur israélien. Soutenant le BDS, Sally Rooney a affirmé qu’elle ne pouvait accepter un nouveau contrat avec une entreprise israélienne qui ne prend pas publiquement ses distances avec l’apartheid et ne soutient pas les droits du peuple palestinien tels que les lui reconnaît l’ONU. Comme on pouvait s’y attendre, cette posture courageuse lui a valu les habituelles accusations d’antisémitisme de la part des réseaux pro-israéliens. Des conséquences potentiellement dommageables pour la suite de la carrière de l’auteure, qui rejoint ainsi l’illustre club des personnalités qui ont fait le choix des valeurs plutôt que le profit en se dressant résolument contre le colonialisme.