Un médicament TEVA? Non, merci !

Bulletin 52, juin 2012

osez-le-boycott-tevaConnaissez-vous les médicaments TEVA ? Les laboratoires TEVA Pharmaceuticals Industrie Lmt, qui les produisent, sont un des fleurons de l’industrie israélienne. L’Association belgo-palestinienne vous invite à vous joindre à une action de boycott de ces produits en allant le 16 juin prochain chez votre  pharmacien pour lui remettre une lettre (jointe au bulletin Palestine n°52) expliquant pourquoi vous ne lui achèterez plus de médicaments du laboratoire TEVA et pourquoi lui-même devrait refuser d’en vendre.

Un success story à l’israélienne…

En 1976, les petites compagnies pharmaceutiques SLE, Assia et Zori fusionnent pour devenir TEVA, une entreprise qui prit de l’ampleur sous l’égide d’Eli Hurvitz. CEO de la compagnie jusqu’en 2002 et décédé au début de cette année, ce dernier fit de TEVA la première entreprise pharmaceutique israélienne mais surtout le leader mondial en matière de médicaments génériques, qui pèse aujourd’hui 28,1 milliards de dollars.

Se focalisant sur les médicaments génériques, l’entreprise concurrence aujourd’hui les géants mondiaux du secteur pharmaceutique. Aux Etats-Unis, en 2009, les médicaments de la compagnie ont fait l’objet de quelque 630 millions de prescriptions, en faisant un fournisseur national plus important que les poids-lourds pharmaceutiques que sont Pfizer, Novartis et Merck pris ensemble (New York Times, 9 mai 2010). TEVA exporte 60% de sa production sur le marché nord-américain et 25% sur le marché européen (Annual report 2010, United States, Securities & Exchange Commission).

…qui sert d’outil de propagande

En novembre 2010, l’Association belgo-palestinienne avait attiré l’attention des lecteurs de la Libre Belgique sur deux publireportages insérés dans le quotidien. Un était consacré à la culture, l’autre – intitulé Israël, du rêve à la réalité – aux prouesses technologiques israéliennes dans la production de voitures électriques, le dessalement de l’eau ou les avancées en matière de biotechnologies et en mettant en exergue le succès de l’entreprise pharmaceutique TEVA.
Ces publireportages sont un exemple type de la campagne de propagande « Brand Israel » dont l’objectif est d’imposer une image positive d’Israël sur la scène internationale. Cette campagne observe évidemment un silence total sur tout ce qui concerne le conflit israélo-palestinien.

Une entreprise comme TEVA est le parfait outil de propagande dans le gout de « Brand Israel » : médicaments de qualité, à prix compétitifs, succès d’une entreprise israélienne sur la scène mondiale. Une très belle image qui fait oublier que cette entreprise est développée dans un pays qui en occupe un autre.

Dans son ouvrage The Political Economy of the Occupation (Pluto Press, 2010), Shir Hever souligne les avantages que les entreprises israéliennes retirent de l’exploitation d’un marché palestinien « captif ». Dans les informations sur les différents marchés qui nourrissent une entreprise comme TEVA, la distinction n’est jamais faite entre Israël et les Territoires palestiniens occupés. Une information laissée volontairement dans l’opacité pour éviter les pressions nationales et internationales, que celles-ci soient en faveur de la colonisation ou condamnent la violation du droit international qu’elle constitue.

L’image de réussite de TEVA occulte par ailleurs la détérioration constante, du fait de l’occupation, de l’accès des Palestiniens aux soins de santé.

Accès des Palestiniens aux soins de santé

Les principaux hôpitaux desservant la Cisjordanie sont situés à Jérusalem-Est. Le cas des hôpitaux Makassed et Augusta Victoria illustre bien les difficultés d’accès aux soins de santé dues à l’occupation. Ces hôpitaux, situés à Jérusalem-Est, étaient en grande partie fréquentés par des Palestiniens résidant en Cisjordanie. Or, la construction du Mur autour de Jérusalem a privé le premier de 60% et le deuxième de 25% de leurs patients, menaçant de ce fait leur rentabilité (rapport OCHA Février 2006). Les patients devront en outre parcourir dorénavant de longues distances pour trouver des soins équivalents, voire pour certains soins particuliers uniquement fournis à Jérusalem-Est, tenter d’obtenir un permis de passage pour y accéder.

En ce qui concerne la bande de Gaza, la situation est encore pire. L’ONG israélienne de défense des droits de l’Homme, B’tselem explique : « Le siège imposé par Israël à la bande de Gaza depuis que le Hamas y a pris le pouvoir de l’appareil sécuritaire en juin 2007 a grandement endommagé le système de santé de Gaza, qui ne fonctionnait déjà pas très bien avant. Beaucoup de services, de spécialistes et de traitements vitaux ne sont pas disponibles aux Palestiniens à Gaza et, depuis que le siège a commencé, l’accès aux soins médicaux dans les hôpitaux en dehors de Gaza a diminué. De plus, lorsque les affrontements entre l’armée et les Palestiniens armés augmentent, le traitement des patients souffrant de maladies chroniques, dont les patients cancéreux ou cardiaques, est postposé, et la fourniture de médicaments et d’équipements médicaux à Gaza est retardée » (voir site btselem.org – section « Gaza strip »).

Mises à part les limitations d’accès du fait du siège, les coupures d’électricité que doivent subir les habitants de Gaza ces derniers temps ont également un impact négatif énorme sur le fonctionnement des hôpitaux (voir article dans ce même numéro). Or, les attaques inhumaines de l’armée israélienne sur la bande de Gaza font régulièrement des victimes, dont certaines décèdent alors qu’elles auraient pu être soignées si les hôpitaux fonctionnaient correctement.

« Soutenir TEVA pour soutenir Israël »…

En 2009, l’Union des Patrons Juifs de France (UPJF) menait une campagne auprès du corps médical pour les inciter à prescrire des médicaments TEVA.

« Aidez Israël en achetant des médicaments génériques. TEVA est un laboratoire pharmaceutique basé à Tel Aviv. Si vous souhaitez prescrire (ou vous faire prescrire) et faire connaître autour de vous ces excellents médicaments (…), vous pourrez consulter la liste des génériques et des médicaments correspondants » (reprise sur le site Europalestine, dans une vidéo mars 2009).

Or, il est interdit en France – comme en Belgique – de faire de la publicité pour des médicaments remboursés par la Sécurité sociale, comme le rappelait la vidéo. Par ailleurs, cette campagne de l’UPJF montre bien que le succès de l’entreprise est important pour l’Etat israélien.

Face à cette campagne, c’est l’argument inverse qui nous vient à l’esprit : vous voulez marquer votre désaccord avec la politique d’occupation d’Israël dans les Territoires palestiniens, une politique qui prive de nombreux Palestiniens d’un accès normal aux soins de santé ? Refusez d’acheter TEVA et partagez votre engagement avec votre pharmacien. Le 16 juin, rendez-vous donc chez votre pharmacien avec la lettre ci-jointe.

Nathalie Janne d’Othée

Note : L’organisation israélienne Who Profits publiera bientôt un rapport sur l’industrie pharmaceutique israélienne et l’occupation.

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