Récemment interviewés par Gili Cohen pour le quotidien Haaretz, des soldats israéliens révèlent que le problème en Cisjordanie “vient des juifs”.
Les dernières attaques des groupuscules extrémistes contre les forces armées israéliennes en Cisjordanie ne sont qu’une manifestation de ce qu’ont subis de nombreux soldats pendant leur services au cours des dernières années. Militaires professionnels et soldats de réserves s’exprime souvent sur la situation difficile dans laquelle ils se retrouvent souvent : devoir protéger les colons tout en étant attaqués par eux.

Extraits de l’interview de Nadav Bigelman, ex-soldat en service militaire
“Notre mission est de protéger les juifs, mais ce sont eux qui génèrent la plupart des problèmes. C’est très troublant”, a expliqué au quotidien Haaretz l’ex-soldat Nadav Bigelman, originaire d’Haifa et démobilisé l’an dernier.
“Vous comprenez vite ce qui se passe, mais ce que vous êtes supposé y faire n’est pas très clair”, révèle-t-il . “Nous ne recevons jamais d’ordre nous expliquant ce que nous devons faire lorsqu’un jeune garçon juif jette des pierres à un palestinien. Sommes-nous autorisé à arrêter les juifs, ou non? Il y a un véritable fossé entre les instructions du commandant et ce qui arrive sur le terrain”.
N. Bigelman travaille aujourd’hui pour l’association israélienne “Breaking the Silence”. Il a servi à Hébron en 2008, et il a tenu à cet époque un journal dans lequel il a consigné et documenté les violences des colons dont il était témoin, du jet de pierres au harcèlement verbal des palestiniens, des touristes et des activistes de gauche.
Un jour, un colon s’en est pris au commandant de son bataillon au cours d’une dispute et a déchiré son uniforme.
“C’est l’exemple le plus évident”, a expliqué l’ex-soldat. “Voici un homme qui sacrifie et consacre sa vie à leur service. Soudain, ils n’aiment pas quelque chose qu’il fait, et c’est comme ça qu’ils réagissent?”, a-t-il déploré. “Et si ça arrive à votre commandant, qu’est-ce que cela révèle par rapport à vous? Que vous ne pouvez rien faire. Vous détestez ça. Vous détestez être ici. Vous êtes ici pour protéger et vous ne savez pas pourquoi vous devez en payer un tel prix”.
Révélations d’un officier de réserve anonyme
“Parallèlement, ce sont les mêmes personnes qui vous apportent des gâteaux quand vous êtes de garde à 14h”, a-t-il ajouté. “Alors quoi. Allez-vous arrêter leurs enfants lorsqu’ils jettent des pierres le jour suivant?”.
Un officier réserviste en charge d’un peloton qui a servi il y a trois mois dans les collines du sud d’Hébron a anonymement rapporté à Haaretz que rien ne l’avait préparé au conflit qui a opposé un groupe de colons à un groupe de bergers palestiniens sur l’exploitation d’une terre de pâturage. “Nous nous sommes placés en force tampon entre les bergers palestiniens et les colons, et ils [les colons] ont commencé à s’en prendre à nous”, a expliqué l’officier. “Ils nous ont dit des choses horribles, ils ont pesté et tempêté. Nous ne savions pas quoi faire, nous étions sous le choc. Nous pensions que les problèmes viendraient des palestiniens, mais le problème vient des juifs”.
“C’est une commnauté entière qui a l’habitude traiter les soldats de cette façon. Même le chef de la sécurité local nous a dit “écoutez, c’est comme ça. Et dans quelques jours, ils crèveront les pneus de ma voiture”, a-t-il révélé. “Ces gens [les colons] sont hors de contrôle. Je suis responsable de leur sécurité tout en sachant qu’un jour ils s’en prendront à ma voiture. Oui, c’est comme ça que ça se passe là-bas”, a conclu le réserviste.
Extraits d’entretien avec un jeune officier anonyme
S’exprimant sous le couvert de l’anonymat, un jeune officier servant en Cisjordanie s’est entretenu avec le quotidien Haaretz. Il a expliqué que “les conflits avec les colons interviennent surtout aux checkpoints. C’est une atteinte à leur dignité que d’attendre comme tous les autres, alors ils forcent parfois et dépassent tout le monde. Peu nous harcèlent, mais quand vient le moment de l’inspection, ils nous blâment et nous humilient. Ils ne comprennent pas que nous ne faisons que notre travail de contrôle pour la sécurité. Bien sûr ils ne sont pas tous comme ça. Mais les conflits avec les juifs aux checkpoints sont bien pires qu’ils ne le sont avec les palestiniens”.
Selon lui, la situation en Cisjordanie s’est inversée. “Nous avons un code d’intervention pour les palestiniens qui jetaient des pierres. Mais aujourd’hui la situation s’est inversée, ce sont les juifs qui jettent des pierres aux palestiniens”.
Alors que le Premier Ministre Benjamin Netanyahu vient d’autoriser l’extension de l’autorité et de la capacité des soldats à agir contre les colons israéliens, les soldats interrogés ont tenu à rappeler le fossé qui se tient entre les règles écrites et la loi du terrain. Selon eux, l’autorité d’agir en principe ne se traduit pas toujours par des ordres concrets.
Source : Palestine News Network