N’investissons pas dans la colonisation israélienne !

Publié ce lundi 5 décembre, le deuxième rapport « Don’t Buy Into Occupation» met en évidence les flux financiers qui continuent d’alimenter les entreprises impliquées dans la colonisation israélienne. Parmi les institutions financières pointées du doigt, se trouvent plusieurs banques belges ou basées en Belgique, BNP Paribas étant encore une fois en tête de classement.

Par Nathalie Janne d’Othée 

La coalition Don’t Buy Into Occupation1 publie son deuxième rapport, qui met une nouvelle fois en lumière les liens financiers des banques et autres institutions financières européennes avec les entreprises directement impliquées dans la colonisation israélienne. Au total, le rapport n’identifie pas moins de 725 banques, gestion- naires d’actifs, compagnies d’assurance et fonds de pension européens qui financent des entre- prises actives dans les colonies israéliennes en territoire palestinien occupé. Entre janvier 2019 et août 2022, ces institutions financières ont accordé 171,4 milliards USD de prêts et de souscriptions à ces entreprises, ainsi que 115,5 milliards USD d’actions et d’obligations. Or, pour rappel, la colonisation du territoire palestinien, l’installation de populations de la puissance occupante et le déploiement d’activités économiques à leur service sont constitutives de crime de guerre et entraînent de nombreuses autres violations du droit international humanitaire et des droits humains. Les États tiers, dont la Belgique, et les entreprises ont, de ce fait, l’obligation juridique de ne pas y contribuer et de prendre toutes les mesures à cette fin.

Parmi les institutions financières présentes en Belgique, on retrouve BNP Paribas, la KBC, Ackermans & van Haaren, la Banque Degroof Petercam, AXA et ING. Ces banques financent des entreprises qui trempent dans des activités allant de la démolition de maisons palestiniennes à la construction et l’expansion des colonies
qui en sont le but, en passant par l’exploitation illégale des ressources naturelles palestiniennes et la mise au point de matériel de surveillance destiné à contrôler les populations palestiniennes vivant à proximité des colonies.

Le rapport met d’ailleurs en exergue l’importance des entreprises du secteur de la surveillance. Le territoire palestinien occupé est en effet l’un des endroits les plus surveillés au monde, ce qui entraîne de nombreuses séquelles physiques et psychologiques chez la population palestinienne. Et l’expertise israélienne est reconnue en la matière parce qu’Israël exporte des technologies ainsi « testées sur le terrain ».

Solvay impliquée

Parmi les entreprises impliquées dans ce secteur, on trouve la seule entreprise belge identifiée dans le rapport comme étant directement impliquée dans la colonisation israélienne: Solvay. En effet, Solvay fournit des fibres renforcées pré-imprégnées pour le drone Hermes 450 de la société israélienne Elbit. Elbit est le premier fournisseur de drones de l’armée israélienne et fournit également d’autres outils de surveillance utilisés dans le territoire palestinien occupé. Or, selon les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme, que Solvay dit respecter, l’entreprise devrait mettre fin à ses activités liées à de graves violations des droits humains, comme c’est le cas dans le territoire palestinien occupé.

Mais comme souligné plus haut, le rapport pointe en particulier les responsabilités de BNP Paribas. La banque est, pour la deuxième année consécutive, le premier financeur de la colonisation israélienne avec plus de 25 milliards USD investis dans des entreprises directement impliquées dans la colonisation. Ces flux financiers sont autant de leviers que les banques devraient actionner pour inciter les entreprises à se désinvestir de la colonisation. Si ces entreprises refusent de le faire, les institutions financières devraient cesser de les financer.

Le gouvernement belge a, lui aussi, un rôle important à jouer, car il est l’actionnaire principal de BNP Paribas, dont il détient 7,7% de son capital, et le propriétaire de Belfius. Dès lors, il peut inciter ces banques à revoir leurs relations avec les entreprises actives dans les colonies israéliennes. La coalition Don’t Buy Into Occupation demande également aux gouvernements européens de réclamer la mise à jour de la base de données des Nations Unies des entreprises liées à la colonisation israélienne.

1/ La coalition Don’t Buy into Occupation (DBIO) est composée de 24 organisations européennes et palestiniennes. Les membres belges de la coalition sont le CNCD-11.11.11 et son homologue flamand, la CSC, la CNE, et Fairfin.

Agissez contre la complicité avec les colonies !

En signant l’initiative citoyenne pour interdire les produits des colonies israéliennes!

Premier pays à dépasser son seuil national,
la Belgique doit continuer à montrer l’exemple et fournir un maximum de nouvelles signatures afin de parvenir au million nécessaire
avant le 19 février 2023.

En interpellant votre banque pour exiger qu’elles désinvestissent des colonies!

En quelques clics, vous pouvez faire connaître à votre banque votre refus d’être indirectement rendu complice de la colonisation israélienne!

 


Des sanctions pour les entreprises belges actives dans les colonies israéliennes

C’est ce que propose le ministre belge de l’Économie, Pierre-Yves Dermagne. Dans la présentation de sa note de politique générale pour 2023, il annonce avoir « demandé une étude sur la possibilité, pour la Belgique, de sanctionner les entreprises belges qui ont des relations économiques et/ou commerciales et/ou financières avec les entreprises qui figurent sur la liste des Nations Unies. »

Pour rappel, la base de données des Nations Unies a été publiée en février 2020. Elle identifie 112 entreprises directement impliquées dans
la colonisation israélienne. Alors que le mandat qui lui a été donné par le Conseil des droits
de l’Homme comprend sa mise à jour annuelle, le Haut-Commissaire n’y a pas encore procédé depuis.

Le ministre Dermagne espère que l’étude avancera des « propositions de mesures ciblées et proportionnées visant à dissuader les entre- prises belges de développer des activités de
ce type qui contribuent ainsi à la politique de colonisation israélienne. » Il entend ainsi
« engager la responsabilité à la fois des entre- prises et de leurs dirigeants, qui encouragent les violations du droit international. »

La proposition est à saluer car elle établit claire- ment un lien entre la politique de différenciation vis-à-vis des colonies israéliennes et le devoir

de vigilance des entreprises. Des avancées législatives sur le devoir de vigilance des entreprises sont en effet aujourd’hui en cours de réalisation aux niveaux belge, européen et onusien. Fin septembre 2022, les travaux sur le sujet ont repris au Parlement belge. L’intégration d’un devoir de vigilance renforcé pour les entre- prises présentes dans les zones de conflit et les territoires occupés est un des enjeux du débat.

Une entreprise peut en effet difficilement avoir des activités dans les colonies israéliennes tout en respectant ses obligations en termes de prise en compte et de respect des droits humains.
Tel est l’avis du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme qui affirmait en janvier 2018 : « Compte tenu du poids du consensus juridique international concernant la nature illégale des colonies elles-mêmes et de la nature systémique et omniprésente de l’impact négatif sur les droits de humains qu’elles provo- quent, il est difficile d’imaginer un scénario dans lequel une entreprise pourrait s’engager dans les activités énumérées1 d’une manière qui soit compatible avec les Principes directeurs (des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme, ndlr) et le droit international. »

1/ Activités ayant des conséquences sur le respect des droits humains dans le territoire occupé et énumérées au §96 du rapport de la mission internationale indépendante mise en place par le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies (voir doc A/HRC/22/63, 7 February 2013, http://www.ohchr.org)

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