La reconnaissance de l’Etat palestinien

Devant l’impasse du processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, plusieurs Etats d’Amérique latine, encouragés par l’Autorité palestinienne, ont procédé ces dernières semaines à des déclarations unilatérales de reconnaissance de l’Etat palestinien comme « Etat libre et indépendant dans les frontières de 1967 ».

Une telle initiative n’est pas une nouveauté en soi. En 1988, lors de sa 19esession tenue à Alger, le Conseil national de l’OLP avait proclamé l’« indépendance » et l’établissement de l’Etat de Palestine. Pas moins de cent Etats appartenant à divers espaces géographiques procédèrent aussitôt à la reconnaissance de l’Etat palestinien. Ces Etats étaient alors principalement des Etats arabes ou bien appartenaient au camp socialiste.

Les Etats occidentaux –en particulier les Etats membres de l’Union européenne- étaient restés en retrait de ce mouvement. Après les récentes  déclarations de reconnaissance de l’Etat palestinien indépendant par différents Etats latino-américains, ce retrait semble se maintenir et se confirmer. En effet, l’Union européenne s’est contentée de déclarer qu’elle reconnaîtrait une entité palestinienne indépendante « le moment venu ». En clair, l’UE subordonne la reconnaissance d’un Etat palestinien indépendant à la conclusion d’un accord de paix entre Israéliens et Palestiniens et se soumet donc au bon vouloir des Israéliens maîtres du jeu d’un « processus de paix » qui, au bout de vingt années, a clairement montré ses limites et s’est révélé complètement inopérant et stérile.

La position de l’UE est largement partagée par les Etats Unis qui lient toute reconnaissance d’un Etat palestinien à un règlement préalable du conflit entre les deux protagonistes C’est ainsi que le Congrès américain a repoussé toute tentative de reconnaissance d’un Etat palestinien en l’absence d’un accord politique entre les deux parties et ce, malgré l’enthousiasme affiché par le Président Obama qui voyait la Palestine comme Etat membre des Nations Unies dans un avenir proche.

Si en droit international, la reconnaissance d’un Etat par des Etats tiers est un acte unilatéral et discrétionnaire, elle doit néanmoins répondre à certaines conditions. Les éléments constitutifs d’un Etat en droit international sont : une population, un territoire et un gouvernement effectif capable d’exercer son autorité sur les plans interne et international. Comme le souligne Monique Chemillier-Gendreau : « L’existence d’un gouvernement n’est plus contestée depuis la création de l’Autorité palestinienne. Pour ce qui est de la population, celle de la Palestine est bien identifiable, même s’il y a la population de l’intérieur et celle de l’extérieur. Le fait qu’une partie de cette population soit en exil n’est pas un obstacle à la reconnaissance d’État. (…). Aujourd’hui, de nombreux indices, et notamment la volonté telle qu’exprimée par les Palestiniens eux-mêmes, montrent que les bases du futur État sont le territoire résultant de la ligne d’armistice de 1967, dite Ligne verte. Il n’y a donc aucun obstacle à d’éventuelles nouvelles reconnaissances de l’Etat de Palestine. ».

L’Autorité palestinienne ne s’y est pas trompée : en sollicitant une reconnaissance de son Etat, elle entend mettre toutes les cartes de son côté  dans l’objectif d’une hypothétique indépendance. Par ailleurs, les Palestiniens entendent mettre à profit cette vague de reconnaissances pour proclamer leur Etat en 2011. Pour ce faire, ils entendent s’appuyer sur une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. En effet, devant la menace  d’un veto, brandie par les  Etats-Unis en cas de saisine de cette question par le Conseil de sécurité, l’Autorité palestinienne envisage de porter l’affaire devant l’Assemblée générale des Nations Unies sur base de la résolution « Acheson » qui permet à cette dernière instance de se saisir d’une question bloquée au Conseil de sécurité en raison d’un usage excessif du droit de veto par l’un de ses membres permanents, en l’espèce les Etats-Unis.

La réaction israélienne à ces reconnaissances en cascade de l’Etat palestinien ne s’est pas fait attendre. Israël les considère comme « contre-productives », unilatérales et attentatoires au processus de paix en cours. D’aucuns considèrent par ailleurs ces actes politiques que constituent les déclarations de reconnaissance de l’indépendance de la Palestine comme de simples gesticulations diplomatiques alors que la situation sur le terrain ne cesse de se détériorer et que la colonisation ne cesse de gangrener les Territoires palestiniens.

Il reste néanmoins à espérer que ces déclarations de reconnaissance auront des conséquences concrètes sur le terrain et qu’elles pourront influer positivement sur la position européenne toujours frileuse dans ce dossier. Si ces espoirs venaient à se réaliser, les Palestiniens pourraient alors considérer toutes ces reconnaissances comme une victoire diplomatique.

Hocine Ouazraf

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