La garde nationale israélienne : une milice anti-palestinienne sur mesure

En contrepartie du gel de la réforme controversée de la justice, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir a obtenu la création d’une garde nationale composés de volontaires et autonome de la hiérarchie policière. Un projet qui fait craindre un surcroît de violence décomplexée contre les Palestiniens. 

Par Marianne Blume

En 2019 déjà, Itamar Ben-Gvir fonde une milice privée de droite connue sous le nom de Garde nationale Otzma Yehudit («Puissance juive», le nom de son parti). Elle se définit comme une «organisation de sécurité civile qui vise à protéger les habitants d’Israël, en particulier Juifs, contre les menaces internes et externes». Elle a été accusée de racisme et de violence envers les Palestiniens d’Israël et critiquée pour ses liens avec des groupes d’extrême droite et ses positions politiques controversées. Elle a été confrontée à des restrictions gouvernementales en raison de ses activités et de ses affiliations politiques. 

«GARDE NATIONALE», DEUXIÈME MOUTURE
En 2021, lors de l’Intifada de l’unité, de Gaza à la Cisjordanie en passant par Israël, les Palestiniens se révoltent; dans les villes mixtes d’Israël comme à Jérusalem, des émeutes meurtrières opposent militants nationalistes juifs et Palestiniens. Dans ce contexte, en 2022, Naftali Benett, Premier ministre, annonce la création d’un «Garde nationale» civile. Telle qu’elle a été conçue à l’origine, cette garde nationale devait être soumise à la police israélienne; elle devait apporter une réponse rapide et efficace aux troubles de l’ordre public simultanément en plusieurs endroits. Elle devait également veiller à ce que les routes restent ouvertes dans les situations d’urgence et fournir une assistance aux forces de sécurité régulières en cas de besoin. Cette nouvelle organisation devait comprendre deux brigades de police des frontières, quelques unités de réserve de la police des frontières et 1000 volontaires ayant servi dans des unités de combat. 

Le gouvernement est tombé avant que le projet n’aboutisse. Ben-Gvir avait bien entendu défendu ce projet qui visait, selon lui, à protéger la population juive. 

UNE FORCE DE SÉCURITÉ COMPOSÉE D’EXTRÉMISTES 
Devenu ministre de la Sécurité nationale, Ben-Gvir remet le couvert. Le 2 avril 2023, la décision de former une Garde nationale est approuvée par le gouvernement israélien. Malgré la volonté de Ben-Gvir, le commandement de cette garde ne lui a pas (encore?) été accordé. La nouvelle force sera une milice paramilitaire agissant aux côtés de la police et de l’armée. Elle se concentrera sur « la criminalité nationaliste (entendre: activités politiques palestiniennes et résistance) et le terrorisme (qui ne peut, bien entendu, être que palestinien), participera au maintien de l’ordre public en utilisant des moyens technologiques et de renseignement, en mettant l’accent sur la capacité à opérer dans des situations d’urgence à haute intensité.» Ben-Gvir a déjà annoncé qu’elle opèrera dans les villes mixtes… contre les Arabes. 

Amir Makhoul, analyste et militant palestinien d’Israël, pointe le danger: «Pour les communautés bédouines et arabes en général, la Garde nationale viendra grossir les rangs des groupes informels dangereux qui existent déjà. Par exemple, les militants d’Otzma Yehudit et d’autres militants d’extrême droite opèrent déjà comme vigiles dans le Néguev, à Bat Yam, à Jaffa, à Lod et dans les implantations mixtes où vivent ensemble des Israéliens juifs et arabes. Il est possible que ces extrémistes soient absorbés par la nouvelle force de sécurité. » Cette crainte est justifiée puisque la « Garde nationale » sera aussi composée de volontaires. En bref, la militarisation de l’apartheid se poursuit inexorablement, en l’absence de plus en plus totale de garde-fous. 

Itamar Ben-Gvir, un fanatique violent devenu ministre

  • 1995 : peu de temps avant l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin, il brandit devant les caméras l’insigne de la voiture de ce dernier et déclare: «On est arrivé jusqu’à ce symbole. On arrivera jusqu’à lui. »
  • 2006 : il défend deux adolescents accusés d’avoir participé à l’incendie d’une maison en Cisjordanie où deux parents et leur bébé ont été brûlés vifs.
  • 2007 : il est condamné pour incitation à la haine et soutien à une organisation terroriste (Kach).
  • Jusqu’en 2020 : il a, dans son salon, une photo de Baruch Goldstein, l’auteur du massacre d’Hébron, qu’il admire.
  • 2021 : il est député à la Knesset. Selon le chef de la police, il est responsable des violences à Jérusalem. Il établit son bureau parlementaire en soutien aux colons en plein Cheikh Jarrah lors de l’expulsion de familles palestiniennes.
  • 2022 : durant la campagne électorale, il brandit une arme à feu et demande à la police de « tirer à balles réelles sur les Arabes » qui jettent des pierres. Lors de l’attaque contre Gaza, il déclare : « pour une roquette de Gaza, 50 missiles sur Gaza. » 
Top