A l’attention de Philippe Goffin, Ministre des Affaires étrangères et de la Défense
Monsieur le Ministre,
Le programme de gouvernement du Premier ministre israélien prévoit de mettre en œuvre à partir de ce 1er juillet un plan d’annexion de la vallée du Jourdain et de toutes les colonies illégales de Cisjordanie occupée. Sur ces territoires, deux millions et demi de Palestiniens vivent sous occupation militaire. En plus d’annexer 30% des territoires et de leurs ressources, Israël ne laisse comme perspective aux Palestiniens que la constitution d’un « État » morcelé, non-viable et non-souverain.
Ce plan d’annexion illégal au regard du droit international légitime des décennies de régime discriminatoire, de pillage, de persécution et de nettoyage ethnique dans le territoire occupé depuis 1967. Il illustre l’opposition d’Israël à tout dialogue de paix juste et durable.
À une écrasante majorité, le Parlement fédéral a voté ce jeudi 25 juin une résolution en réaction au projet d’annexion du gouvernement israélien. Le texte demande au gouvernement belge « 1. de prendre des initiatives avec des pays tiers aux niveaux européen et multilatéral, afin de prévenir l’annexion par Israël des territoires palestiniens, ou d’une partie de ceux-ci ; et 2. de jouer un rôle de premier plan aux niveaux européen et multilatéral en vue de l’élaboration d’une liste de contre-mesures efficaces destinées à répondre de manière proportionnelle à toute annexion israélienne du territoire palestinien occupé ».
La nécessaire lutte contre l’annexion de jure ne doit toutefois pas occulter celle plus générale contre l’occupation et le système d’apartheid (entendu comme un « régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un groupe ethnique sur un autre groupe ethnique ») en vigueur en Palestine. La poursuite de la colonisation, le blocus illégal et criminel de Gaza, les destructions de maisons, les assassinats, les discriminations structurelles contre les citoyens arabes d’Israël, les incarcérations politiques et l’interdiction faite aux réfugiés de revenir sur leurs terres constituent autant de violations des droits qui justifieraient, à elles seules, la mise en place de sanctions.
Monsieur le Ministre, nous vous demandons instamment de traduire la volonté du parlement en actes concrets et dissuasifs.
La Belgique dispose de différents leviers politiques et juridiques pour mettre en œuvre des mesures proportionnelles à la gravité de l’annexion. Elle doit également inciter d’autres gouvernements européens à sanctionner collectivement Israël car le plan d’annexion est déjà mis en œuvre notamment par l’expulsion des Palestiniens des territoires que ce plan à prévu d’annexer.
En outre, il est grand temps que la Belgique se mette en conformité avec l’obligation de ne pas contribuer au développement des colonies israéliennes, et donc d’exclure du marché belge les produits issus des colonies, d’exclure les colonies du champ d’application des traités bilatéraux et de dissuader fermement nos entreprises de continuer à entretenir des relations commerciales et d’investissement avec les colonies. Vous conviendrez avec nous, Monsieur le Ministre, que les enjeux en matière de justice internationale et de la paix dans la région sont trop importants pour se contenter d’adopter une attitude passéiste.
Il est grand temps que l’Union européenne suspende ses accords d’association avec Israël, tant pour la partie concernant la zone de libre échange que pour les accords technique et scientifique dans le cadre du programme Horizon Europe, où des entreprises installées dans les colonies bénéficieraient de financements européens. En ce sens, l’accord aérien entre l’UE avec Israël voté par le Parlement européen ce 1 juillet est inacceptable en la circonstance.
Nous vous appelons, Monsieur le Ministre, à prendre d’urgence en Belgique ainsi qu’à l’U.E et au Conseil de sécurité des N.U. les mesures fortes et contraignantes, contributions indispensables pour défendre les droits des Palestiniens et pour l’avenir de la coexistence des deux Etats, Israël et la Palestine dans les frontières de 1967.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de notre parfaite considération.
Pierre Galand,
Président de l’Association belgo-palestinienne