« Les leçons de sécurité » en Israël : Témoignage de Hakim D.

« Les leçons de sécurité » en Israël : Témoignage de Hakim D.

Bruxelles, le 12 mai 2016

Je m’appelle Hakim D., j’habite à Courtrai. Possédant la double nationalité belge et marocaine, je suis étudiant en Master 2 de « Relations Interculturelles et Coopération internationale », spécialité Afrique et Monde arabe, à l’Université Charles de Gaulle de Lille. Dans le but d’approfondir mes connaissances sur cette zone géographique, j’avais fait le choix d’effectuer mon stage de fin d’études au Consulat belge à Jérusalem pour une durée de six semaines. Cette immersion professionnelle devait me permettre de renforcer mes acquis théoriques et de découvrir un pays qui m’était alors inconnu. Validée par le consulat belge de Jérusalem et approuvée par ma faculté, tout était en ordre et clairement établie.

Le jeudi 17 Mars 2016, j’ai donc pris l’avion pour Tel Aviv. Averti par divers témoignages de mon entourage, je savais que j’allais probablement être interrogé une fois sur place sur les raisons de ma venue. J’avais donc pris soin de préparer tous les documents attestant de mon stage auprès du consulat, y compris mon contrat de stage signé par le consul général belge (M. Bruno Jans). J’ai effectivement dû patienter plusieurs heures en arrivant à l’aéroport de Tel Aviv et j’ai subi plusieurs interrogatoires. Parmi les nombreuses questions, on m’a demandé où je comptais me rendre, d’où j’étais issu—à la fois sur le plan ethnique, culturel et familial ; ils m’ont demandé la raison de l’émigration de mes parents en Belgique, pourquoi ils n’étaient pas restés au Maroc ; et enfin le raisons de ma venue en Israël. J’ai toujours répondu à toutes leurs questions de manière coopérant et honnête. Cependant, la suite des événements s’est révélée beaucoup plus éprouvante que ce à quoi je m’étais préparé.

En effet, j’ai subi de mauvais traitements et une humiliation que je n’avais jamais subis auparavant dans ma vie, au point que j’en reste traumatisé encore jusqu’à aujourd’hui. Dès mon arrivé, mon passeport m’a été confisqué jusqu’au jour de mon rapatriement humiliant et incompréhensible en Belgique. Mon téléphone ainsi que toutes mes affaires personnelles m’avaient été confisqués jusqu’à mon retour en Belgique, excepté mon grand sac de 16 kg, que je n’ai jamais plus récupéré. Suite à cela, on m’a annoncé que je n’étais pas le bienvenu en Israël et que je ne devais plus y revenir. Pour justifier mon refus d’entrer sur le territoire, il était indiqué : « prevention of illegal immigration considerations ».

On m’a alors fait subir de terribles humiliations. Les douaniers israéliens m’ont dénudé de force et ont pratiqué sur mon corps des fouilles très embarrassantes avec des outils imbibés de produits malodorant qui ont eu des effets toxiques sur moi. Je me suis sentie humilié. On m’a ensuite emmené sans aucunes explications dans une prison à une trentaine de minutes de l’aéroport. J’ai été enfermé dans une cellule abjecte durant trois jours, avec cinq autres détenus, dans des conditions ignominieuses. Je n’ai même pas pu téléphoner à ma famille durant ces trois jours de captivité. Un mail envoyé en cachette à l’ambassade belge avant mon arrestation leur a permis de savoir où j’étais. Madame Lieve, la consule, est par ailleurs venue me rendre visite, m’a réconforté et a contacté ma famille, morte d’inquiétude. A l’heure actuelle, je ne connais toujours pas les raisons des mauvais traitements qui m’ont été infligés. Aucunes informations ne m’ont été délivrées. En revanche, on m’a fait comprendre que je n’étais rien et que mon destin était entre leurs mains.

Je suis aussi très déçu et en colère d’avoir été contraint à renoncer à mon stage. Ce stage m’aurait pourtant été très bénéfique, tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel, car il entrait parfaitement dans la spécialité de mes études et m’aurait permis de me former dans un cadre très enrichissant. Je ne suis pas sûr de pouvoir saisir une nouvelle fois une opportunité de stage aussi intéressante et formatrice que celle qui m’attendait au Consulat belge à Jérusalem.

Je suis conscient de ne pas être le seul ni le premier à avoir vécu ce genre d’expérience à l’aéroport de Tel Aviv, ce qui est révoltant. L’aéroport Ben Gourion à la réputation d’être l’un des aéroports les plus sûrs au monde, tant les contrôles des passagers sont minutieux, longs et réalisés avant tout par du personnel, plutôt que par de simples machines. Ceci constitue certes un moyen exemplaire pour lutter contre l’insécurité. Cependant, ces contrôles humains ne devraient en aucun cas être synonymes d’abus de pouvoir de la part du personnel chargé de la sécurité et des contrôles, car ils occasionnent malheureusement humiliation et traumatisme pour ceux qui ne sont pas acceptés sur le sol israélien. Cela n’est absolument pas acceptable et doit être sanctionné afin de ne plus être reproduit, car personne ne mérite de tels traitements.

 

Top