La tragédie qui se joue aujourd’hui dans la bande de Gaza a brutalement remis la question palestinienne au centre de l’actualité. L’attaque du Hamas du 7 octobre et la campagne militaire génocidaire israélienne qui s’en est suivie trouvent leur origine dans la violence de l’occupation, le déni des droits des Palestiniens et l’impunité totale d’Israël. Cela s’est traduit par la mise en place et le maintien d’un système structurel d’oppression, de répression et d’agression multiforme contre le peuple palestinien, destiné à lui dénier tout droit à vivre sur sa terre.
La communauté internationale a sa part de responsabilité dans ce drame. Malgré la poursuite effrénée de la colonisation dans le territoire occupé, les attaques contre la société civile palestinienne et la multiplication des rapports d’ONG et d’experts internationaux accusant Israël de pratiquer l’apartheid, les partenariats avec Israël, non seulement n’ont pas été remis en cause mais ont proliféré. À cet égard, la promotion de la normalisation des relations avec Israël par certains États, notamment à travers les « Accords d’Abraham », visait à évacuer la question palestinienne plutôt qu’à mettre Israël devant ses responsabilités.
Les retombées de la situation au Proche- Orient, tant chez nous qu’au niveau international, montrent qu’il est urgent d’apporter, enfin, des réponses structurelles à la question palestinienne. Il ne s’agit pas, en effet, d’un « conflit » lointain qui ne nous concernerait pas, comme on l’entend dire trop souvent. L’UE est un partenaire de premier plan d’Israël et son premier partenaire économique. Elle dispose par conséquent d’un énorme pouvoir d’influence pour le contraindre à se plier à ses obligations au regard du droit international. Ajoutons que les États ont l’obligation de ne pas collaborer au maintien d’une situation illégale, à laquelle s’ajoute la nécessité impérieuse, soulignée par la décision de la Cour internationale de justice du 26 janvier 2024, de ne pas contribuer à un génocide à Gaza. On rappellera que ce sont les sanctions et l’isolement international qui ont mis fin au régime d’apartheid en Afrique du Sud.
Le présent mémorandum contient des propositions essentielles à mettre en œuvre pour que la Belgique contribue utilement au démantèlement du régime d’oppression imposé au peuple palestinien depuis trop longtemps, condition première d’une paix juste et pérenne dans la région. Ces mesures sont de trois ordres : assurer soutien et protection au peuple palestinien ; mettre fin à l’impunité d’Israël ; cesser toute forme de complicité avec ses crimes.
Gaza
Génocide en cours
En dépit de sa qualité de Puissance occupante au regard du droit international, depuis 2007, Israël a instauré un blocus drastique contre la bande de Gaza, accompagné d’agressions meurtrières récurrentes (2008-9, 2012, 2014, 2018-19, 2021), ce qui a eu pour résultat une économie moribonde, un chômage exponentiel, une pauvreté galopante, un dé-développement tel qu’un rapport de l’ONU prévoyait déjà qu’en 2020 Gaza serait invivable.
Depuis le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive totale contre la bande de Gaza : bombardements aveugles, coupures de l’électricité, coupures de l’eau potable, famine organisée et refus d’acheminer les médicaments. Israël provoque délibérément une crise humanitaire. Toutes les infrastructures civiles ou privées sont visées.
Israël a forcé plus d’1 700 000 Gazaoui·es à fuir dans des zones prétendument sûres, bombardées à leur tour. À ce jour, plus de 33 000 personnes ont été tuées dont 14 500 enfants (chiffres UNICEF) ; plus de 75 000 ont été blessées, sans compter celles enfouies sous les décombres. Enfin, des enfants meurent déjà de malnutrition et le PAM (Programme alimentaire mondial) juge qu’1,1 million de Gazaoui·es souffrent de la famine de manière catastrophique.
En janvier 2024, la Cour internationale de justice a énoncé qu’il y avait des présomptions de génocide à Gaza et elle a enjoint à Israël de s’abstenir de commettre des actes entrant dans le champ d’application de la Convention sur le génocide et de prendre des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture de l’aide humanitaire à la population civile de Gaza. Or non seulement Israël continue à empêcher une aide humanitaire suffisante d’être convoyée efficacement mais encore il continue quotidiennement à tuer des civils dans leurs maisons, dans leurs tentes, dans les hôpitaux ou les écoles, sur les routes.
Cisjordanie et Jérusalem-Est occupée
Colonisation forcenée
La colonisation fait partie intégrante de la politique israélienne d’accaparement des terres. Elle fait l’objet de condamnations répétées de la part de l’UE, des États-Unis et de l’ONU au vu de son illégalité au regard du droit international. Depuis l’avènement du nouveau gouvernement d’extrême droite de Netanyahou en décembre 2022, la construction de nouveaux logements dans les colonies s’est accélérée à un niveau inédit et la régularisation des colonies sauvages est devenue pratique courante. La responsabilité de l’administration du territoire occupé est passée de l’armée à la sphère civile, ce qui se traduit par la soumission formelle de la gestion de la Cisjordanie occupée aux intérêts nationaux et sociaux de l’État d’Israël (soit une annexion de facto),une violation directe du droit international.
D’après l’ONU, depuis le 7 octobre, la violence des colons s’est amplifiée : 603 attaques de colons avec, pour conséquence directe, le déplacement forcé de 1222 Palestiniens de 19 communautés d’éleveurs et l’assassinat de 9 Palestiniens. De son côté, le gouvernement israélien accentue la répression en Cisjordanie. L’armée y mène quotidiennement des incursions dans les villes, villages et camps de réfugiés. Comme à Gaza, elle détruit les rues, les hôpitaux, les infrastructures publiques et des maisons privées. Depuis le 7 octobre, ce sont plus de 400 Palestiniens qui ont été ainsi abattus par l’armée israélienne.
Israël
Un apartheid insidieux
Les citoyens israéliens palestiniens descendants de ceux qui n’ont pas été expulsés après la création d’Israël représentent 20 % de sa population et bénéficient en principe de l’égalité des droits. Ils font néanmoins face à des discriminations systémiques dans des domaines tels que l’accès au logement, à la propriété ou à l’éducation : Adalah, l’organisation de droits humains, a recensé plus de 70 lois ségrégationnistes. Des discriminations que la loi dite « de l’État-Nation » de 2018 ne fait que renforcer.
Depuis le 7 octobre, les Palestiniens d’Israël sont traités comme une « cinquième colonne ». Des étudiants, des enseignants, des employés sont sanctionnés, renvoyés pour la simple expression de leur solidarité avec les civils palestiniens à Gaza.
Réfugiés
Un exil perpétuel
En dépit des résolutions de l’ONU, Israël interdit aux plus de 6 millions de réfugiés palestiniens vivant de par le monde de revenir sur leur terre alors que tout·e Juif·ve a le droit de s’installer en Israël. Une discrimination qui relève de l’apartheid. Depuis le 7 octobre, les pressions d’Israël s’intensifient pour liquider l’UNRWA, l’agence onusienne qui assure l’aide humanitaire aux réfugiés (éducation, santé, aide humanitaire, services sociaux…) et mettre fin au statut de réfugié palestinien.
I. Assurer soutien et protection au peuple palestinien
1. Soutenir les efforts internationaux en vue de prévenir le génocide à Gaza
[Belgique / Union européenne]
Le 26 janvier, la Cour internationale de justice reconnaissait le risque de génocide à Gaza, notamment au regard des appels à la haine et autres déclarations sans ambiguïté des dirigeants israéliens, et prenait des ordonnances pour le prévenir. En décembre 2023, la Fédération internationale pour les droits humains affirmait, pour sa part, qu’Israël perpétrait d’ores et déjà un génocide contre les Palestiniens à Gaza. C’est également la conclusion de Francesca Albanese, Rapporteure spéciale de l’ONU pour les droits humains en territoire palestinien occupé, auteure d’un rapport paru ce 25 mars et intitulé « Anatomie d’un génocide », qui affirme « qu’il existe des motifs raisonnables de croire que le seuil indiquant que des actes de génocide » ont été commis « contre les Palestiniens à Gaza a été atteint. »
Le 26 janvier, la Cour internationale de justice reconnaissait le risque de génocide à Gaza, notamment au regard des appels à la haine et autres déclarations sans ambiguïté des dirigeants israéliens, et prenait des ordonnances pour le prévenir. En décembre 2023, la Fédération internationale pour les droits humains affirmait, pour sa part, qu’Israël perpétrait d’ores et déjà un génocide contre les Palestiniens à Gaza. C’est également la conclusion de Francesca Albanese, Rapporteure spéciale de l’ONU pour les droits humains en territoire palestinien occupé, auteure d’un rapport paru ce 25 mars et intitulé « Anatomie d’un génocide », qui affirme « qu’il existe des motifs raisonnables de croire que le seuil indiquant que des actes de génocide » ont été commis « contre les Palestiniens à Gaza a été atteint. »
🔸 La Belgique doit reconnaître qu’Israël commet actuellement un génocide dans la bande de Gaza.
🔸 Elle doit également soutenir la plainte sud-africaine contre Israël pour génocide à Gaza devant la Cour internationale de justice et envisager des plaintes contre les États qui se rendent coupables de complicité de génocide, à l’instar du Nicaragua qui accuse l’Allemagne de faciliter un génocide dans la bande de Gaza en soutenant Israël et en cessant de financer l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens.
2. Reconnaître la réalité de l’apartheid israélien
[Régions / Belgique / Union européenne]
L’apartheid, crime contre l’humanité, consiste à imposer de manière systématique la domination d’un groupe racial (au sens social du terme) sur un autre au moyen de lois, de politiques et de pratiques discriminatoires avec l’intention de maintenir ce régime et en l’accompagnant d’actes inhumains. Il est défini par plusieurs textes majeurs de droit international (dont le Statut de Rome de 1998, qui institue la Cour pénale internationale et dont est signataire la Belgique). En vertu du droit international, il est interdit aux États tiers de contribuer au maintien de ce type de régime et il leur est fait obligation de collaborer afin d’y mettre fin.
Il y a consensus parmi les ONG des droits humains sur le fait qu’Israël pratique un apartheid contre le peuple palestinien. Les premières à l’avoir signalé sont les organisations palestiniennes de défense des droits humains. Mais depuis 2021, leur constat a été entériné par l’organisation de défense des droits humains israélienne B’Tselem (2021), par Human Rights Watch (2021), par Amnesty International (2022) et par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’Homme dans les territoires palestiniens occupés Michael Lynk et sa successeure, Francesca Albanese (2022).
En Israël même, l’accusation est relayée par des personnalités de premier plan, comme Avraham Burg, l’ancien président du Parlement israélien et, plus récemment, Tamir Pardo, l’ancien chef du Mossad, le service israélien du renseignement.
Dans le sillage de l’organisation palestinienne de défense des droits humains Al Haq, l’ABP considère que l’apartheid est un instrument du colonialisme de peuplement israélien et qu’il s’exerce sur l’ensemble du peuple palestinien, que ce soit dans le territoire palestinien occupé, en Israël même ou sur les réfugiés palestiniens en exil.
🔸 Il importe aujourd’hui que les États et le monde politique reconnaissent cette réalité. Concrètement, les États doivent soutenir le rétablissement du Comité spécial de l’ONU contre l’apartheid (qui avait été créé pour mettre fin à l’apartheid sud-africain) afin qu’il enquête sur la réalité de cette pratique par Israël.
🔸 Les partis pourraient en outre promouvoir l’adoption de résolutions pour que les différents parlements et exécutifs du pays et le Parlement européen reconnaissent qu’Israël pratique effectivement l’apartheid, comme l’ont déjà fait plusieurs communes belges ainsi que le Parlement régional catalan.
3. Soutenir la société civile palestinienne
[Régions / Belgique / Union européenne]
Face aux divisions intrapalestiniennes entre Gaza et la Cisjordanie, les organisations de la société civile palestinienne sont devenues le dernier rempart contre les violences de l’apartheid israélien et l’annexion du territoire occupé. C’est pourquoi elles sont persécutées par le gouvernement israélien. À titre d’exemple, en 2021, 6 organisations palestiniennes de défense des droits humains ont ainsi été qualifiées sans preuves de terroristes. Parmi celles-ci, deux sont aujourd’hui financées par des programmes DGD (Direction générale Coopération au développement et Aide humanitaire), tandis que les autres sont des partenaires réguliers des organisations belges de solidarité internationale. En 2022, les locaux de ces six organisations ont été perquisitionnés et mis sous scellés. Les membres de leur personnel risquent d’être arrêtés à tout moment.
🔸 La Belgique et l’UE doivent non seulement maintenir leur soutien financier aux organisations ciblées mais aussi exiger d’Israël qu’il retire la désignation aussi infamante qu’injustifiée de ces organisations comme « terroristes ». L’UE et la Belgique doivent renforcer leur soutien politique et financier à une société civile autonome et forte en Palestine afin de lui permettre de subsister.
4. Soutenir l’UNRWA et le droit et retour des Palestiniens
[Belgique / Union européenne]
Créée au lendemain de la Nakba, c’est-à-dire le déplacement forcé de 750 000 Palestiniens lors de la création de l’État d’Israël en 1948, l’UNRWA, l’agence de l’ONU les réfugiés palestiniens, prodigue aujourd’hui des services humanitaires et de développement essentiels à plus de 5,9 millions de personnes réparties dans des camps dans le territoire palestinien occupé, la Syrie, le Liban et la Jordanie. En effet, le statut de réfugié palestinien se transmet aux nouvelles générations, lesquelles disposent du droit au retour sur leurs terres et/ou à de justes compensations, ce droit étant garanti par la résolution 194 de l’Assemblée générale de l’ONU.
Depuis de nombreuses années, Israël et ses relais à l’étranger prennent pour cible l’UNRWA. L’objectif essentiel est d’affaiblir le statut de réfugié palestinien et donc le droit au retour des réfugiés. Il s’agit également d’affaiblir la société palestinienne dans son ensemble, à la survie et à la dignité de laquelle l’UNRWA contribue grandement, notamment sur le plan de l’éducation.
Ces agressions atteignent aujourd’hui leur paroxysme, avec une efficacité redoutable. À la suite des allégations – sans preuves – selon lesquelles 12 employés de l’UNRWA auraient participé à l’attaque du 7 octobre, les États-Unis, suivis par plusieurs de leurs alliés européens, ont annoncé la suspension de leur contribution à l’agence, au moment même où la Cour internationale de justice avertissait du risque génocidaire que faisaient peser sur les Palestiniens de Gaza les entraves à l’aide humanitaire.
🔸 La Belgique doit œuvrer au maintien à la fois de la pérennité financière de cette agence dont les missions humanitaires sont essentielles et à la protection du statut de réfugié palestinien et de la défense du droit au retour des réfugiés palestiniens.
5. Protéger la liberté d’expression des défenseurs des droits des Palestiniens
[Régions / Belgique / Union européenne]
Confronté à un mouvement de solidarité internationale de plus en plus puissant en faveur des droits du peuple palestinien, l’État d’Israël consacre des moyens colossaux à blanchir son image à l’étranger. Un de ses angles d’attaque consiste à taxer d’antisémitisme quiconque ose critiquer sa politique d’oppression systématique du peuple palestinien. En Europe, dans des régions marquées par la mémoire et la culpabilité du judéocide, cette stratégie se révèle redoutable. Les militants pour les droits du peuple palestinien y sont réduits au silence, voire criminalisés. Cette instrumentalisation dévoie le nécessaire combat contre le racisme anti-juif, en hausse ces dernières années, voire renforce celui-ci.
🔸 Les États doivent garantir la défense de la liberté d’expression en matière de critique de la politique israélienne lorsqu’il est fondé sur le rappel du respect du droit international.
🔸 Ils doivent également s’opposer à l’adoption de la définition de travail de l’antisémitisme de l’IHRA, laquelle entretient la confusion entre la critique d’Israël et le racisme anti-juif et sur laquelle s’appuient de façon quasi systématique celles et ceux qui cherchent à faire taire toute critique de la politique israélienne.
II. Mettre fin à l’impunité d’Israël
1. Instaurer des sanctions contre Israël
[Belgique / Union européenne]
Voilà des décennies que la Belgique et l’Union européenne condamnent avec plus ou moins de force la colonisation du territoire palestinien occupé. L’inanité de cette position est patente. L’année 2023 marque un record absolu en termes de lancement de constructions de colonies, de vols de terres et de violences exercées par les colons sur les Palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. En résulte, en plus des violences auxquelles sont confrontés quotidiennement les Palestiniens, un véritable nettoyage ethnique des zones convoitées par les autorités israéliennes.
Ces violations répétées des droits des Palestiniens, Israël n’en paye pas le prix, ses affronts répétés à la légalité internationale et aux droits humains n’étant assortis d’aucunes contre-mesures de la part de l’UE ou de la Belgique. C’est cette même impunité qui permet à Israël de poursuivre sa guerre génocidaire à Gaza.
Après l’invasion de l’Ukraine, il n’a fallu que quelques jours pour que l’Union européenne sanctionne lourdement la Russie. Or voici plus de 56 ans qu’Israël occupe le territoire palestinien et multiplie les actes d’agression contre le peuple palestinien. Ce double standard évident mine la crédibilité de l’Union européenne dans sa prétention à défendre le droit international, qui devrait être au cœur de son action extérieure.
🔷 La Belgique et l’Union européenne doivent contribuer à l’instauration de sanctions diplomatiques et économiques contre Israël et ses représentants coupables de crimes de guerre et d’incitation à la haine ou au génocide jusqu’à ce qu’il se plie au droit international, en particulier en ce qui concerne l’abolition de l’apartheid, qui constitue une norme impérative du droit international.
2. Suspendre l’accord d’association EU-Israël
[Union européenne]
Depuis 2000, l’accord d’association entre l’UE et Israël permet une totale détaxation des produits israéliens exportés vers les États de l’UE, à l’exclusion théorique de ceux des colonies. Il définit également les termes de la participation d’Israël à de nombreux programmes européens, qui permettent notamment aux entreprises israéliennes de jouir d’importants financements communautaires en matière de recherche. Des entreprises d’armement israéliennes comme Elbit System, notoirement connue pour tester ses drones sur les Palestiniens, ont ainsi bénéficié des fonds européens du programme de recherche Horizon Europe.
🔷 Suspendre cet accord en raison des violations continues des droits humains et du droit international commises par Israël, comme l’y invite expressément son article 2, permettrait de donner un sérieux coup d’arrêt à l’impunité dont il a jusqu’à présent bénéficié. Ce faisant, l’UE ne ferait que mettre en œuvre et respecter les règles qu’elle a elle-même établies.
3. Suspendre les missions économiques en Israël
[Régions / Union européenne]
Promouvoir le commerce avec Israël malgré ses violations massives du droit international et des droits humains contribue à conforter son sentiment d’impunité. Or les organismes régionaux de promotion à l’exportation AWEX (Wallonie) et hub.brussels (Région bruxelloise) planifient, à intervalles réguliers, des missions économiques dans des pays qui violent massivement les droits humains, dont Israël, et ce malgré les protestations des groupes de défense des droits humains.
🔷 Les prochaines déclarations gouvernementales doivent proscrire explicitement la promotion du commerce dans les pays qui violent les droits humains, ce qui est le cas d’Israël, coupable de génocide, de crimes contre l’humanité tels que l’apartheid ou de crimes de guerre tels que la colonisation et le nettoyage ethnique via notamment les déplacements forcés de populations.
III. Mettre fin à notre complicité avec les violations du droit international
1. Interdire les produits des colonies israéliennes
[Belgique / Union européenne]
Toutes illégales au regard du droit international, les colonies israéliennes en territoire palestinien occupé (Jérusalem-Est et Cisjordanie) constituent le principal vecteur de la dépossession du peuple palestinien et des violations massives de ses droits. Selon la CNUCED (2016), le PIB de la Palestine pourrait doubler si les obstacles liés à l’occupation et la colonisation étaient levés. Premier débouché pour les produits des colonies israéliennes, l’UE conforte ainsi la pérennité du système colonial en territoire occupé. Si nous soutenons par principe le boycott d’Israël tant qu’il maintiendra son système d’oppression contre l’ensemble des Palestiniens, l’interdiction des produits des colonies est une obligation légale qui s’impose aux Etats, qui sont tenus de ne pas contribuer au maintien de situations découlant de violations du droit international.
🔻 Des progrès ont été faits en matière de différenciation au niveau belge durant cette législature, à savoir la distinction dans toutes les relations bilatérales avec Israël entre le territoire israélien et les colonies. Il s’agit désormais de se mettre en conformité avec nos obligations internationales et d’interdire tout commerce avec les colonies situées illégalement en territoire occupé et tout investissement dans celles-ci. 20 000 Belges l’ont réclamé en signant l’Initiative citoyenne européenne Stop trade with settlement/Made in Illegality en 2022-2023. En novembre 2023, une proposition de loi d’interdiction du commerce avec Israël sur les produits en provenance des territoires occupés a été déposée.
2. Exclure des marchés publics les entreprises qui entretiennent des liens avec les colonies israéliennes
[Régions / Belgique / Union européenne]
Les entreprises et les institutions financières qui entretiennent des relations avec lacolonisation jouent un rôle crucial dans la survie économique et l’expansion des colonies. Jusqu’à présent, elles n’ont pas eu à souffrir de conséquences de ces investissements qui alimentent de graves violations des droits humains. Pourtant, les gouvernements disposent aujourd’hui de nombreuses sources d’information quant au risques légaux et moraux de tels investissements. En février 2020, les Nations Unies ont ainsi publié une « base de données des Nations Unies » des entreprises opérant dans les colonies israéliennes. Elle a été mise à jour pour la première fois en juin 2023. Depuis 2021, Don’t Buy Into Occupation (DBIO), coalition de 25 organisations palestiniennes, régionales et européennes basées en Belgique, en France, en Irlande, aux Pays- Bas, en Norvège, en Espagne et au Royaume-Uni, réalise un rapport annuel sur les liens financiers entre les institutions financières européennes et les entreprises impliquées dans la colonisation israélienne. Parmi les entreprises épinglées dans son troisième rapport publié en décembre 2023, figurent AirBNB, Caterpillar, Carrefour, Alstom ou encore Solvay.
🔻 Le gouvernement fédéral doit appliquer les recommandations de la coalition DBIO, notamment :
- Utiliser son influence en tant que propriétaire (à 100% de Belfius) et actionnaire (5% de BNP) pour faire en sorte que ces banques revoient leurs relations avec les sociétés actives dans les colonies israéliennes ;
- Renforcer les conseils existants aux entreprises en ce qui concerne les activités financières et économiques dans les colonies israéliennes et les promouvoir de manière plus proactive vis-à-vis des entreprises et institutions financières belges ;
- Jouer un rôle actif et constructif dans les négociations en cours sur le Traité contraignant des Nations Unies sur les entreprises et les droits humains, ainsi que dans les négociations d’une nouvelle « Directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité » et leur transposition en droit belge, et faire pression pour que les activités en territoire occupé soient incluses dans le champ d’application de ces initiatives.
🔻 Les différents niveaux de pouvoir doivent par ailleurs exclure de leurs marchés publics les entreprises impliquées dans la colonisation israélienne.
3. Instaurer un embargo militaire total contre Israël
[Régions / Belgique / Union européenne]
L’emploi abusif par Israël de la force létale contre la population palestinienne occupée est notoire. Outre les massacres d’ampleur durant la guerre de Gaza initiée en octobre 2023 dont les victimes se comptent désormais par dizaines de milliers, le nombre de morts a également atteint des proportions inédites en Cisjordanie, avec plus de 500 tués depuis le début de l’année (dont la moitié de civils et un quart d’enfants), dont 300 depuis le 7 octobre, un record en deux décennies. Il est également avéré qu’Israël pratique la torture sur les prisonniers palestiniens et s’est rendu à de nombreuses reprises coupable de crimes de guerre, notamment lors des précédentes interventions contre la bande de Gaza, et de façon encore plus massive lors de la guerre en cours au point, a minima, de faire peser un risque de génocide contre les Palestiniens de Gaza selon la Cour internationale de justice.
Les échanges et les coopérations militaires avec Israël contribuent dès lors aux violations structurelles des droits du peuple palestinien. Au regard des ordonnances de la Cour internationale de justice visant à prévenir le risque de génocide à Gaza, ne pas instaurer d’embargo militaire intégral contre Israël peut faire de la Belgique une complice de génocide.
🔻Concrètement, l’UE, la Belgique et les Régions doivent imposer un embargo militaire contre Israël et exclure les composantes militaires de leurs relations commerciales avec lui.
🔻Elles doivent également s’abstenir de toutes formes de coopération sécuritaire avec Israël, sa prétendue « expertise » en la matière étant fondée sur les violations massives des droits du peuple palestinien.
Pour en savoir plus
Apartheid
🔻 L’apartheid israélien envers le peuple palestinien, rapport d’Amnesty international, février 2022
🔻 Un seuil franchi : Les autorités israéliennes et les crimes d’apartheid et de persécution, rapport de Human Rights Watch, avril 2021
Génocide
🔻 Anatomie d’un génocide, rapport de Francesca Albanese, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits humains dans le territoire palestinien occupé, mars 2024
🔻 Le génocide et l’occupation par Israël menacent irrémédiablement l’autodétermination palestinienne, rapport de la FIDH
Colonialisme de peuplement
🔻 Situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, rapport de Francesca Albanese, A/77/356, septembre 2022
🔻 Israeli Apartheid: Tool of Zionist Settler Colonialism, rapport de Al-Haq, novembre 2022