A Gaza, les troupes israéliennes tirent sur les enfants

Au moins 10 enfants palestiniens ont été blessés par balle par des soldats israéliens au cours des trois derniers mois, alors qu’ils ramassaient des gravats dans ou près de la zone tampon créée par Israël le long de la frontière de la bande de Gaza, dans une offensive de « basse intensité » en marge du blocus du territoire palestinien.

Les soldats israéliens tirent régulièrement sur les habitants de Gaza bien au-delà de la limite non signalée du no man’s land officiel de 300 mètres de large, selon les associations des droits de l’homme.

Selon Bassam Masri, chef du département d’orthopédie à l’hôpital Kamal Odwan à Beit Lahiya, dans le nord de Gaza, environ 50 personnes ont été soignées pour des blessures par balles subies dans ou à proximité de la zone tampon, alors qu’ils ramassaient des gravats au cours des trois derniers mois, environ cinq ont été tuées.

Il estime que 30% des blessés sont des garçons de moins de 18 ans.

Mohammed Sobboh et son frère Adham (@Guardian)
Mohammed Sobboh et son frère Adham (@Guardian)

Defence for Children International (DCI) a recensé 10 cas d’enfants, âgés de 13 à 17 ans, touchés par balles au cours d’une période de trois mois, à une distance entre 50 et 800 mètres de la frontière. Neuf ont été touchés à la jambe ou au bras, l’un à l’estomac.

La création de la zone de no man’s land a obligé les agriculteurs à abandonner les terres et les habitants à quitter leurs maisons de peur de se déplacer sous le feu. Le mois dernier, un homme de 91 ans et deux adolescents ont été tués tandis qu’ils récoltaient des olives en dehors de la zone officielle, lorsque les troupes israéliennes ont commencé à tirer des obus. Quarante-trois chèvres sont également mortes dans l’attaque.

Dans un autre cas, une mère de cinq enfants a été tuée en juillet, par un obus, devant son domicile près de la zone en question.

Israël a créé la zone tampon à l’intérieur de la bande de Gaza après la guerre de trois semaines en 2008-9, affirmant qu’il visait à empêcher les tirs de roquettes des militants. Il a largué des tracts à partir d’avions à plusieurs reprises avertissant les populations locales de ne pas s’aventurer à moins de 300 mètres de la clôture qui marque la frontière sous risque d’être abattu.

Toutefois, l’ONU, les organismes d’aide et de défense des droits de l’homme déclarent qu’Israël a officieusement et sans avertissement étendu la zone jusqu’à un kilomètre de la clôture, les habitants et les agriculteurs ignorants s’il est sûr d’accéder à leurs terres ou leurs biens.

« L’armée sait que les enfants sont là pour ramasser. Ils les voient tous les jours et ils savent qu’ils n’ont pas d’armes », a déclaré Mohammed Abu Rukbi, un travailleur de terrain avec DCI. « Ils font généralement des tirs de sommation mais les enfants n’y prennent pas vraiment garde. »

Mohammed Sobboh, 17 ans, a été touché par balles juste au-dessus du genou le 25 août alors qu’il était à 800 mètres de la frontière, a-t-il déclaré. Les 12 personnes de sa famille n’ont pas d’autres revenus et n’ont pas droit à l’aide de l’ONU car ils ne sont pas réfugiés.

Les soldats israéliens ont abattu un cheval et un âne, utilisés par Mohammed et ses frères pour transporter les décombres, a-t-il dit.

Son frère, Adham, 22 ans, dit que les enfants, à partir de l’âge de huit ans, ramassent les débris des anciennes colonies de peuplement et des bâtiments démolis pour 30 à 40 shekels par jour. « Le prix a baissé parce que beaucoup de gens se sont mis à ramasser », a déclaré Adham.

Selon le Dr Masri, le nombre de tirs a augmenté au fur et à mesure que les habitants appauvris de Gaza se sont tournés vers la collecte de gravats pour les revendre vendre comme matériau de construction, des matériaux toujours sous blocus israélien. « Chaque jour, nous avons un ou deux cas. Certains enfants se retrouvent avec un handicap permanent. La plupart des blessures se situent aux jambes et aux pieds, ce qui suggère que les soldats n’ont pas pour but de tuer. Cela signifie qu’ils savent que les gens ne sont pas des militants. »

Ziad Tamboura, 27 ans, couché dans un lit d’hôpital avec un pied couvert de pansements, a été touché la semaine dernière alors qu’il travaillait à 500 mètres de la frontière. Les rayons X ont montré les os de son pied défoncés par la balle. Il ramassait des débris afin de nourrir sa femme et son enfant. « Si je suis capable de marcher à nouveau, je vais y retourner. Il n’y a pas d’autre travail. »

Le centre Al-Mezan pour les droits de l’homme, à Gaza, constitue un dossier juridique en collaboration avec les associations israéliennes Adalah et Médecins pour les droits de l’homme, pour mettre un terme à la zone tampon officielle. « La zone [que les Israéliens] ont déclarée n’est pas la même que ce qui existe sur le terrain », a déclaré Samir Zaqout du centre.

Il a critiqué les Israéliens pour les tirs et les bombardements contre les civils non armés. « Ils savent tout. Ils ont la capacité technologique pour surveiller la zone. Ils ont des drones dans le ciel en permanence. Ils sont tout sous observation et sous contrôle. »

Selon l’ONU, environ 30% des terres arables de Gaza sont compris dans les 300 mètres de la frontière, longue de 50 km. Les difficultés rencontrées par les agriculteurs pour atteindre leurs terres ont un impact sur la disponibilité des cultures dans la bande de Gaza, a déclaré Zaqout. « Les tomates sont maintenant 10 shekels le kilo, alors que le prix était d’un ou deux shekels. »

La famille Abu Said, dont les terres se trouvent en dehors de la zone tampon, avait confiance parce que leurs visages étaient bien connus des troupes israéliennes de la zone de surveillance. « Tous les six ou sept jours les membres de ma famille sont là [sur le terrain]», a déclaré Mohammed Abu Said.

Mais le 12 septembre, Ibrahim Abou Saïd, 91 ans, son petit-fils de 17 ans, Hussam et un ami de la famille, Ismail Abu Owda, 16 ans, ont été tués par un obus tiré d’un char depuis le côté israélien de la frontière. « C’était un très vieil homme, prenant soin de ses chèvres », a déclaré Mohammed, fils d’Ibrahim. « Notre terre était comme un paradis. Maintenant, elle est comme un désert. »

Il a accusé les militants palestiniens ainsi que l’armée israélienne de tirer des roquettes.

Dans un communiqué, l’armée israélienne a déclaré que la zone tampon de 300 mètres avait été créé en réponse à « de nombreux incidents relevant de l’activité terroriste hostile » près de la barrière de sécurité, souvent « sous un déguisement civil ».

Il a ajouté: « Les forces israéliennes agissent dans le but de prévenir les dommages aux populations civiles dans ses opérations et toute plainte concernant la conduite exprimé ses soldats sera… examinée conformément à la politique existante. »

Dans la ligne de tir

Les enfants touchés dans la « zone tampon » lors du ramassage des gravats

Mohammad, 17 ans, une balle dans la jambe gauche, à 800m de la frontière, le 25 août

Khaled, 16 ans, touché à la cuisse gauche, à 600m de la frontière, le 31 juillet

Hameed, 13 ans, une balle dans le bras gauche, à 50m de la frontière, 14 juillet

Nu’man, 14 ans, touché à la jambe droite, à 300m de la frontière, 10 juillet

Arafat, 16 ans, touché à la cheville gauche, à 50m de la frontière, 10 juillet

Mohammad, 16 ans, blessé à l’estomac, à 500m de la frontière, 23 juin

Abdullah, 16 ans, atteint juste au-dessus la cheville droite, à 60m de la frontière, 22 juin

Ibrahim, 16 ans, blessé à la jambe droite, à 400m de la frontière, 16 juin

Awad, 17 ans, touché juste au-dessus de son genou droit, à 350m de la frontière, le 7 juin

Hasan, 17 ans, blessé juste au-dessous du genou droit, à 300m de la frontière, le 22 mai

Harriet Sherwood à Beit Lahiya, 11 octobre 2010

Source: the Guardian

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