Majid Rabah, 11 ans, avait un large sourire sur son visage dans l’appartement de sa famille, dans le quartier de Tel al-Hawa à Gaza, le lundi 4 octobre. Il venait d’entendre les nouvelles : les deux soldats israéliens qui l’avaient utilisé comme bouclier humain avaient été reconnus coupables de leurs crimes devant un tribunal militaire israélien.

L’incident a eu lieu le 14 janvier 2009, au milieu des 22 jours d’invasion et de bombardement de la bande de Gaza, tuant 1.400 Palestiniens – pour la moitié des femmes et des enfants – et faisant des milliers de blessés.
Effaf Rabah, la mère de Madjid, se souvient que ce jour-là, les bombardements israéliens sur Tel al-Hawa s’étaient intensifiés, « j’ai pris Majid et ses deux sœurs au rez-de-chaussée de notre bâtiment pour trouver un abri sûr contre les obus de char et les missiles israéliens. » Effaf Rabah se souvient que de nombreuses autres familles avaient trouvé refuge au rez-de-chaussée, beaucoup avaient des valises de lait et de nourriture pour leurs enfants.
« Un Plusieurs soldats israéliens ont fait irruption au rez-de-chaussée, ils ont éloigné les hommes et regroupé les femmes et les enfants. » Effaf Rabah se rappelle le moment terrible où les deux soldats se sont approchés: « ils nous ont pris Majid, pour le mettre devant eux et se sont dirigés vers la salle de bains. »
Majid, toujours souriant, se souvient de ce moment : «Ils m’ont attrapé et j’ai fait pipi sur moi. » Puis les soldats ont ordonné à Majid d’inspecter un sac qu’ils soupçonnaient d’être piégés. « Ils m’ont ordonné d’ouvrir le sac, mais je ne les comprenais pas », dit Majid. « Puis un soldat m’a frappé au visage et ils ont ouvert le feu sur le sac. »
Encouragée par des membres de la famille et les amis, Effaf Rabah a défendu le dossier de Majid avec l’O.N.G. Defence for Children International – section Palestine. En novembre 2009, Effaf a été convoquée avec Majid du côté israélien de la frontière d’Erez où ils ont tous deux rencontré un officier de l’armée israélienne pour discuter de leur cas.
Puis le 3 mai de cette année, Effaf a été à nouveau convoquée à Erez, où elle, Majid et son avocat ont rencontré un procureur israélien. Le lendemain, les trois ont été emmenés à Beer Sheva, dans le sud d’Israël, où ils ont témoigné au premier procès pour violation des droits humains lors de l’attaque israélienne.
«Je ne m’attendais pas à ce que mon fils soit suffisamment courageux pour parler si couramment sur ce qui lui est arrivé dans l’appartement. Maintenant nous sommes tous soulagés de voir que la justice a triomphé après avoir entendu que les deux soldats ont été condamnés par le tribunal, a déclaré Effaf.
Le soldat encourt jusqu’à trois ans de prison.
Si ce moment de justice est doux pour la famille Rabah, il est extrêmement rare. Ce qui est arrivé à la famille Rabah et à ses voisins ce jour-là s’est passé partout dans la bande de Gaza, pendant que la machine de guerre israélienne terrorisée et traumatisée l’ensemble de la population, 1,5 millions de personnes, avec des bombardements jour et nuit, les survols assourdissant des avions de guerre et des incursions terrestres qui ont dévasté des quartiers entiers, faisant des dizaines de milliers de déplacés.
Selon les enquêtes menées par de nombreux groupes de droits humains et le rapport Goldstone, les soldats israéliens ont commis des meurtres de sang-froid de civils non armés, ont utilisé des civils comme boucliers humains, ont harcelés et même dérobé des cartes de paiement et de crédit à un certain nombre de familles de Gaza. Bon nombre des crimes supposés constitue des crimes de guerre et crimes contre l’humanité, selon la conclusion du rapport Goldstone.
Un Conseil des droits humains comité de suivi la semaine dernière a révélé que les autorités israéliennes n’avaient pas mené des enquêtes crédibles sur les allégations et les preuves documentées dans le rapport Goldstone.
L’utilisation de boucliers humains par l’armée d’Israël est une pratique récurrente au cours des diverses invasions israéliennes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. En 2005, la Haute Cour israélienne a jugé la pratique illégale. Il y a eu plus de 150 plaintes au sujet de la conduite des soldats au cours de la récente attaque à Gaza, dont 36 pour crimes de guerre. Selon le quotidien israélien Haaretz, seuls 47 ont été étudiées et la plupart d’entre elles ont été classées sans suite.
Majid, maintenant près de 12 ans, se dit heureux de la décision du tribunal. Prié de dire s’il s’attend à ce que les soldats israéliens puissent le harceler à l’avenir, Majid a exprimé l’espoir que cela ne se produise pas. « S’il y a la paix, moi-même, les enfants de Palestine et les enfants d’Israël jouiront de la paix, plutôt que de souffrir de plus de guerres », dit-il.
6 Octobre 2010
Rami Almeghari est un journaliste et professeur d’université dans la bande de Gaza.
traduction : Julien Masri