Jérusalem-Est, territoire palestinien occupé
Au cours de la guerre de juin 1967, Israël a illégalement annexé Jérusalem-Est. Pour la communauté internationale, Jérusalem-Est constitue bien un «territoire palestinien occupé». Sur la base des résolutions des Nations Unies[1], les Palestiniens revendiquent donc légitimement Jérusalem-Est comme la capitale de leur futur Etat, tandis qu’Israël considère Jérusalem «réunifiée» comme sa capitale «éternelle et indivisible».
Une intense politique de colonisation
Depuis 40 ans, Jérusalem-Est subit une intense politique de colonisation: le nombre de colons y est passé de 103.000 en 1986 à près de 200.000 en 2005. Ses 250.000 résidents palestiniens sont munis d’un titre de «résident permanent» délivré par les autorités israéliennes, identique à celui qui est accordé aux résidents étrangers en Israël. Non seulement ils paient des impôts à la municipalité israélienne sans bénéficier des mêmes services que les Israéliens mais, de plus, ils sont inexorablement poussés à l’exil par une implacable politique de «judaïsation» de la ville dont l’objectif est d’inverser la majorité démographique au profit des Israéliens.
Une politique de planification urbaine sur mesure
Les zones non construites de Jérusalem-Est sont déclarées «zones vertes» (interdites à la construction) et, dans les quartiers déjà construits, obtenir un permis de construire est extrêmement difficile, ces quartiers n’ayant généralement pas de plan d’aménagement qui permette l’obtention d’un tel permis. Le résultat d’une telle politique est clair: soit les Palestiniens construisent illégalement leur habitation et risquent de rejoindre la liste très longue de ceux dont la maison a été démolie, soit ils émigrent en Cisjordanie hors de la «ville réunifiée».
Une gestion drastique du droit de résidence
Tout est fait pour réduire drastiquement le nombre de Palestiniens détenteurs d’un permis de résidence: impossibilité d’obtenir le regroupement familial depuis la ratification en 2003 d’une loi qui l’interdit, ce qui oblige le conjoint-résident à quitter la ville, confiscation du permis de résidence pour motifs divers, y compris pour être resté «trop longtemps» hors de la ville, etc. Près de 100.000 résidents palestiniens se trouvant hors des limites municipales ont ainsi déjà perdu leur droit de résidence dans Jérusalem ou sont menacés de le perdre.
L’expulsion des institutions palestiniennes
Pour achever le processus de judaïsation de Jérusalem-Est, le Parlement israélien a voté en 1995 (en violation flagrante de l’engagement pris par Israël, dans le cadre des négociations d’Oslo, «de préserver et de contribuer au bien-être» des institutions palestiniennes), la «loi pour l’application des accords d’Oslo» (sic) dont l’un des chapitres décrète …l’illégalité de toute institution palestinienne à Jérusalem!
Vidée de ses institutions nationales, culturelles et politiques, désertée par sa population qui vit depuis lors en dehors de ses limites et colonisée par près d’un quart de million de colons juifs, Jérusalem-Est se meurt.
Le Mur achève la judaïsation de Jérusalem
Sur les 181 kilomètres de mur prévus dans et autour de Jérusalem, 130 kilomètres ont déjà été construits. Le tracé final du Mur autour de Jérusalem-Est, tout en annexant 4% de la Cisjordanie, concourt à l’objectif d’un rapport de 70% de Juifs pour 30% de Palestiniens dans Jérusalem. Ceci aboutirait à la proclamation d’une souveraineté exclusivement israélienne sur la ville et anéantirait de facto le projet des Palestiniens de faire de Jérusalem-Est leur capitale.
Le Mur détruit le tissu social de la ville et viole le droit des Palestiniens à la santé et à l’éducation.
Outre les quelque 100.000 Palestiniens de Jérusalem-Est qui risquent de perdre leur statut de résident, plus de 100.000 autres, habitant dans des villes périphériques et pour qui l’accès à Jérusalem est vital, se retrouveront de l’autre côté du Mur, lequel sépare ainsi davantage les Palestiniens entre eux que les Palestiniens des Israéliens. En effet, l’accès aux principaux centres de santé de la ville deviendra de ce fait impossible pour les habitants de Cisjordanie et de Jérusalem-Est qui se retrouvent de cet autre côté du Mur. Le Mur prive également élèves, étudiants et professeurs d’un accès libre aux écoles de Jérusalem-Est et de Cisjordanie.
Jérusalem, cité religieuse emmurée
La politique d’annexion et d’exclusion menée par Israël à Jérusalem remet en cause son statut de ville ouverte pour les trois religions monothéistes dont les droits historiques sur les Lieux saints ont été reconnus par les Nations Unies.
Le Mur empêche une grande partie des Palestiniens, chrétiens et musulmans, de se rendre dans leurs Lieux saints respectifs. Les habitants des villes périphériques palestiniennes (Bethléem, Abu Dis,…) sont empêchés d’entrer à Jérusalem. Quant aux habitants de Jérusalem, il leur est de plus en plus difficile d’accéder à l’Esplanade des Mosquées, en raison de l’aggravation des mesures israéliennes pour en contrôler l’accès.
La Cisjordanie, coupée en deux
La construction du Mur dans et autour de Jérusalem-Est est un palier supplémentaire dans la politique israélienne de consolidation du «Grand Jérusalem», menée autour de trois axes : l’intégration des colonies adjacentes, l’expulsion de la population palestinienne et la rupture du lien social, économique et politique entre Palestiniens.
Le plan «E1», dont les travaux ont débuté en 2006, prévoit l’expansion du bloc de colonies de Maale Adumim, à l’Est de Jérusalem. Ce plan (cf. carte) achèvera l’encerclement complet de la ville par les colonies israéliennes. Le Mur rattachera ce bloc de colonies à la frontière orientale de Jérusalem. En conséquence, Jérusalem-Est sera isolée de la Cisjordanie, tandis que s’établira une continuité territoriale israélienne de Jérusalem jusqu’à la vallée du Jourdain, laquelle coupera la Cisjordanie en deux zones géographiques séparées.
Le tramway de la colonisation
En juillet 2005, un contrat prévoyant la construction et l’exploitation d’une ligne de tramway entre Jérusalem-Ouest et les colonies de Jérusalem-Est a été signé avec le consortium City-Pass, lequel comprend deux entreprises françaises, Alstom et Connex. En favorisant ainsi l’accessibilité et l’attractivité de ces colonies et en signant avec la municipalité de Jérusalem un contrat relatif à Jérusalem-Est, ces deux entreprises confortent la souveraineté israélienne sur la ville, dont l’annexion n’a jamais été reconnue par la communauté internationale. La responsabilité française est d’autant plus engagée que l’Etat français est actionnaire d’Alstom. Or, la IVe Convention de Genève fait obligation à l’Etat français de n’apporter aucune assistance à la politique israélienne d’annexion et de colonisation et de veiller à ce que ses ressortissants ne contribuent pas à son renforcement.
L’illégalité de la politique israélienne à Jérusalem-Est
La politique d’annexion et de colonisation, menée par Israël à Jérusalem-Est, a été condamnée par de nombreuses résolutions des Nations Unies[2]. La construction du Mur dans et autour de la ville est une violation supplémentaire du droit international, actée par l’Assemblée générale des Nations Unies et qualifiée comme telle par la Cour internationale de Justice dans son avis du 9 juillet 2004. Enfin, la politique israélienne constitue également une violation de la «feuille de route» (cf. fiche « feuille de route »), dès lors qu’elle empêche une solution négociée du statut de Jérusalem.
Conclusion
Les gouvernements successifs israéliens poursuivent leur politique du «fait accompli» et compromettent la possibilité d’un accord final avec les Palestiniens. En renforçant la colonisation, en isolant totalement Jérusalem-Est de son arrière-pays et de la Cisjordanie et, enfin, en scindant la Cisjordanie en deux, le Mur rend impossible la création d’un Etat palestinien viable et souverain, avec Jérusalem-Est pour capitale.
Pour en savoir plus :
Bibliographie
- – «Rapport sur Jérusalem-Est»-Chefs de poste à Jérusalem et Ramallah – novembre 2005 consultable sur www.association-belgo-palestinienne.be sous rubrique Divers articles;
- – «La construction du Mur dans et autour de Jérusalem-Est et le droit international» – François Dubuisson, professeur à l’ULB – décembre 2005
Sites Internet
- – Anti-Apartheid Wall Campaign: www.stopthewall.org;
- – ICAHD (Israeli Committee Against House Demolitions): www.icahd.org;
Coalition for Jerusalem: www.coalitionforjerusalem.blogspot.com
[1] Voir fiche « ONU »
[2] Voir fiche « ONU »