Une journée d’amusement à Tel Aviv et la désobéissance civile

Par un matin de printemps, il n’y a pas si longtemps, quatre femmes ont franchi le checkpoint Betar : Ilana Hammerman, une traductrice et éditrice israélienne et trois filles palestiniennes d’un village de Cisjordanie. Les filles, Aya, Lin et Yasmin – qui à cause de leur jeune âge n’ont pas vécu un seul jour libres d’occupation – sont allées avec Ilana à une journée d’amusement à Tel Aviv. Elles ont visité le musée, le centre commercial et le marché, se sont trempées dans la mer, ont mangé des glaces sur un banc du boulevard et au retour du soir, elles ont retraversé le checkpoint pour retourner chez elles. Hammerman raconte cette histoire optimiste dans son article, « S’il y a un ciel », Haaretz, 7 mai 2010.

Mais ces activités simples et optimistes ont transformé les quatre femmes en criminelles d’après le droit israélien. Une organisation dénommée « Le forum légal pour le pays d’Israël » a demandé au procureur général d’ouvrir une enquête criminelle contre Hammerman pour violation de la « Loi d’entrée en Israël » – qui établit que quiconque qui conduit, loge ou assiste par d’autres moyens l’entrée d’un Palestinien en Israël sera condamné à deux ans de prison ou subira une amende.

Par un acte de désobéissance civile, Ilana Hammerman a mis le doigt sur une des composantes fondamentales du régime d’occupation israélien : la législation. Des dizaines de lois et de règlements, civils et militaires, définissent et dictent chaque détail de la vie des Palestiniens dans les Territoires occupés. Où ils vont, comment ils y arriveront, comment ils travailleront, où ils vivront et avec qui ils partageront leur vie. La plupart de ces règles et règlements viole le droit international, les lois israéliennes fondamentales, ainsi que l’empathie et la logique humaines, et Ilana a eu raison de choisir de les violer. Les actions de Ilana sape la légitimité du contrôle sans fin de millions de personnes par une autorité « démocratique » à laquelle elles ne participent pas, et rejettent la séparation entre Juifs et Palestiniens, qui est un des fondements du régime d’occupation. C’est un geste de défi nécessaire face à une réalité insupportable.

Si et quand elle est poursuivie en justice, Ilana refuse son droit à un avocat. Elle veut faire prendre conscience et générer un débat public en Israël et à l’étranger – sur les questions de l’occupation, de l’obéissance aveugle et sur des situations où le fait d’obéir à la loi constitue une trahison de la conscience de chacun et de l’esprit humain. « Je n’ai pas fait cela comme un défi irréfléchi, » écrit-elle, « mais plutôt après y avoir beaucoup réfléchi. A partir d’un besoin, qui devenait de plus en plus pressant ces dernières années, de soulever quelques questions essentielles pour une discussion en profondeur dans la société israélienne. »

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