
Communiqué de presse de l’Association Belgo-Palestinienne
Le 15 mai 2018
Une fois de plus, le voile pudique qui sépare la société israélienne de la cruelle réalité coloniale s’est brutalement déchiré ce lundi 14 mai. D’un côté, les officiels américains et israéliens célébraient avec faste le déplacement illégal de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem décidé par Donald Trump. De l’autre, les forces de sécurité israéliennes ponctuaient des semaines de répression de la « marche du retour » – protestation pacifique des habitants de la bande de Gaza pour réclamer le droit reconnu des réfugiés sur les terres et les propriétés dont ils ont été expulsés en 1948 – par un massacre sanglant. Plus d’une cinquantaine de Palestiniens sont ainsi tombés sous les balles des tireurs d’élite de l’armée israélienne, portant à plus d’une centaine le nombre de victimes et à plusieurs milliers celui des blessés depuis le 30 mars, date du début de la mobilisation.
Une profonde cohérence relie la répression des commémorations de la Nakbaet le déplacement de l’ambassade américaine: la volonté de nier le fait national palestinien. Elle doit se comprendre par l’ambition de Washington d’imposer aux Palestiniens une paix qui n’en aurait que le nom, moins basée sur une quelconque notion de justice que sur l’application brute des rapports de domination. Cette attitude ne peut que galvaniser le sentiment d’impunité de l’extrême droite au pouvoir à Tel-Aviv, dont le dirigeant, Benjamin Netanyahou, s’est dit prêt à réitérer le macabre forfait de ce lundi.
Alors que les organisations de défense des droits de l’Homme telles qu’Amnesty International ou Human Right Watch dénoncent des « crimes de guerre » et un « bain de sang », les réactions des chancelleries européennes sont loin d’être à la hauteur. Certaines, comme la Tchéquie, la Roumanie, ou la Hongrie, ont choisi de piétiner ouvertement le droit international et les valeurs dont se prévaut l’Union européenne (UE) en torpillant un projet de résolution condamnant le déplacement de l’ambassade et en participant aux cérémonies d’inauguration. Plus nombreux sont les États qui, tout en réprouvant l’emploi disproportionné de la force, cherchent à délégitimer la « marche du retour ». À cet égard, nous ne pouvons que déplorer le fait que le ministre des Affaires étrangères belge, Didier Reynders, reprenne à son compte le mensonge israélien consistant à réduire une mobilisation de la société civile à une manœuvre politique du Hamas.
Enfin, les fréquents« appels à la retenue de toutes les parties », selon les mots de la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, laissent une désagréable impression d’équidistance entre l’occupant et l’occupé. Cette posture choque d’autant plus que le Vieux Continent représente l’un des principaux partenaires économiques et commerciaux d’Israël, et dispose à ce titre d’un précieux levier d’influence.
Nos gouvernants ne peuvent pas plus longtemps se laver les mains du sang des victimes dont elles choient les bourreaux. Face à la morbide surenchère du duo Trump-Netanyahou, l’Association belgo-palestinienne appelle les autorités belges et européennes :
- À contrer l’unilatéralisme américain en se positionnant résolument du côté du droit, y compris en prenant des mesures fortes comme la reconnaissance de l’État de Palestine.
- À soutenir le droit des Palestiniens à se mobiliser pour leurs droits internationalement reconnus, et celui des sociétés civiles occidentales à s’organiser pour le défendre, y compris à travers le recours au boycott.
- À cesser toute collaboration avec Israël jusqu’à ce que celui-ci respecte les résolutions de l’ONU, ce qui passe par la suspension de l’accord d’association UE-Israël.
- À signifier de la manière la plus ferme aux autorités israéliennes le caractère inacceptable des massacres en cours. La Belgique doit convoquer d’urgence l’ambassadeur d’Israël et rappeler notre ambassadeur à Tel-Aviv.
[Avec d’autres organisations, l’Association belgo-Palestinienne invite les citoyens à se mobiliser massivement en soutien à Gaza, mardi à 18h au Carrefour de l’Europe (Gare Centrale). Lien vers l’événement Facebook: https://www.facebook.com/events/194545397844529/]
Ce que dit le droit :
« Il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs voisins ». Résolution de l’ONU n° 194 du 11 décembre 1948
« Le Conseil de sécurité[…]réaffirme la nécessité impérieuse de mettre fin à l’occupation prolongée des territoires arabes occupés par Israël depuis 1967, y compris Jérusalem ».Résolution n°476 du Conseil de Sécurité de l’ONU du 30 juin 1980
« Le Conseil de sécurité […] demande aux États qui ont établi des missions diplomatiques à Jérusalem de retirer ces missions de la Ville sainte ».Résolution n° 478 du Conseil de sécurité de l’ONU du 20 août 1980