A l’occasion des élections européennes, l’ ABP a interpellé les candidats des différents partis politiques belges sur leur position quant au rôle de l’Union européenne pour mettre un terme aux violations du droit dans les Territoires palestiniens
Peut-être en raison du contexte politique général, peu de candidats ont répondu malgré l’envoi d’un courrier personnalisé.
Ce sont surtout les positions des partis qui ont été exprimées et non l’avis ou l’engagement personnel des candidats! Certains enrichissent la position officielle par des commentaires supplémentaires (voir réponses de Mmes Laanan et Delvaux) ou comme Mme De Keyser renvoyant vers son site où « ses interpellations donnent le sens de tout son engagement au Moyen-Orient ».
Avec la réponse d’ECOLO, par les voix d’Isabelle Durant et de Jean-Michel Javaux, on peut reconnaître les positions concertées et argumentées des Verts européens : réponses identiques en France et en Belgique .
Et il en va de même, mais de façon moins formelle, pour la LCR et le NPA (France) !
Nous n’avons reçu aucune réponse du MR excepté Olivier Chastel, Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, chargé de la préparation de la présidence belge de l’UE, qui nous répond en faisant valoir la position des Affaires étrangères belges.
Vous ne trouverez pas la réponse du PTB, non pas parce qu’ils ne nous ont pas répondu…Mais parce qu’ils n’ont pas reçu notre envoi ! Pourquoi ? Erreur dans l’adresse mail !
En règle général, les réponses montrent une volonté d’un règlement politique de la question palestinienne et celle de faire valoir une approche basée sur le droit.
Question : Plusieurs déclarations officielles européennes appellent depuis des années au respect par Israël du droit international et du droit international humanitaire. Or, la situation ne cesse de se dégrader sur le terrain. Concrètement, que comptez-vous mettre en œuvre pour que ces déclarations soient suivies d’effet ? Et tout d’abord, pour faire ouvrir les points de passage de et vers la bande de Gaza et mettre un terme aux projets de colonisation ?
Pour ECOLO , Israël doit se conformer aux engagements pris vis-à-vis des Palestiniens et de la Communauté internationale dans la Feuille de route et annapolis. L’« accord sur l’accès et le mouvement (AMA) signé entre l’Autorité palestinienne, Israël et l’Union européenne s’est démontré inefficace » ; l’UE doit donc jouer « un rôle beaucoup plus actif et utiliser tous les moyens de pression sur Israël pour que tous les autres points de passage de et vers la bande de Gaza puissent être ouverts de manière permanente et durable ».
Pour le CDH , l’Europe doit jouer un rôle politique et non seulement de bailleur de fonds – il déplore qu’elle n’arrive pas à parler d’une seule voix.
Pour la LCR , il faut « un rapport de force qui contraigne Israël et ses alliés » à respecter le droit, notamment par la mise en œuvre, à tous les niveaux, de la campagne « BDS – Boycott, Désinvestissement, Sanctions », en s’inspirant de la lutte internationale contre le régime d’apartheid.
Tous les partis se prononcent aussi en faveur de l’arrêt de la colonisation .
ECOLO adopte une position sans équivoque : « l’intensification de la colonisation rend impossible la création d’un Etat palestinien viable et, dans une plus large mesure, empêche la paix au Proche-Orient » et appelle à « une campagne de responsabilisation et de sensibilisation à l’égard des entreprises européennes pour qu’elles ne participent en aucun cas à l’expansion de la colonisation ».
La campagne « BDS – Boycott, Désinvestissement, Sanctions » doit, pour la LCR, permettre de remettre en question la politique israélienne dans les Territoires palestiniens, notamment celle de la colonisation.
Enfin le PS condamne « la poursuite de la colonisation » ainsi que l’offensive meurtrière sur Gaza et les humiliations imposées à la population palestinienne en Cisjordanie.
2. Les relations UE/Israël
Question : En tant que parlementaire européen, vous aurez à vous prononcer sur la politique européenne dans la région.
– La persistance de la violation des droits de l’Homme dans les territoires palestiniens occupés conduit à une violation de l’article 2 de l’accord d’association signé entre l’Union européenne et Israël. Comptez-vous appeler à la suspension de l’accord d’association tant que le droit n’est pas respecté, dans la lignée de la résolution du Parlement européen d’avril 2002 ?
– L’accord d’association UE-Israël est en voie de rehaussement. Vous prononcerez-vous de manière officielle contre ce rehaussement ? Vous serez amené à vous prononcer sur la participation d’Israël aux programmes communautaires. Voterez-vous contre cette participation ?
– L’Union européenne a financé de nombreuses infrastructures dans les Territoires palestiniens qui ont été détruites par l’armée israélienne. Envisagez-vous de demander réparation pour les projets financés par l’UE et détruits par Israël ?
Le PS ne pense pas qu’un vote dans l’hémicycle du PE, par exemple par le vote de sanctions, qui recommanderait la suspension de l’accord d’association, puisse régler le problème de manière durable et équitable. Néanmoins, vu la politique des autorités israéliennes, le PS trouve que ce n’est absolument pas le moment d’envoyer des signes d’encouragement à destination des autorités israéliennes (=rehaussement). Par ailleurs, l e PS prône le principe : les destructeurs doivent être les payeurs . Pour lui, il serait certainement opportun que l’Union Européenne demande des comptes à Israël
La LCR soutient tout ce qui peut faire pression sur Israël . Mais demander la suspension des accords d’association UE-Israël conclus dans le contexte du Processus de Barcelone ne suffit pas. La LCR n’est pas d’accord avec ce Processus qui met en place des accords inégalitaires. Elle appelle aussi à ce qu’« Israël assume le coût des destructions qu’il provoque ».
ECOLO plaide en f aveur « du déclenchement et de la mise en œuvre de l’article 2 de l’accord d’association » dans un cadre d’application contraignant. En outre, il rappelle que « le rehaussement des relations avec Israël devait être résolument subordonné au respect des engagements pris à Annapolis dans le sens d’un règlement politique global, de la mise en œuvre intégrale de l’accord d’association intérimaire CE-OLP et du règlement de la crise humanitaire dans les territoires occupés ». ECOLO s’engage en outre à interpeller « la Commission pour infraction au droit communautaire et inaction dans ce domaine et les Etats Membres pour non-application des dispositions de l’accord d’association en matière de droits de douane ». Ecolo considère également que « la reconstruction et la réhabilitation de la Bande de Gaza doit être impérativement basée sur des garanties claires de la part d’Israël afin d’assurer que les projets de reconstructions ne puissent être à nouveau détruits ».
Pour le CDH , l ‘offensive israélienne contre Gaza d’une part et la formation d’un gouvernement israélien qui remet en cause l’existence de deux Etats d’autre part, requiert un redoublement de la pression internationale sur Israël pour revenir à la table de négociations en vue d’une paix durable. Ce qui requiert que l’Europe parle d’une seule voix (ce qui n’est pas toujours le cas) – Il n’est donc pas question, pour le CDH, d’aller plus avant maintenant sur la voie du rehaussement. Il n’est pas question d’accepter la demande israélienne de participer à des délibérations internes de l’Union, notamment en matière de politique étrangère et de sécurité commune (PESC).
Le CDH ne s’est pas prononcé sur la suspension des accords d’association, ni sur les réparations pour les projets financés par l’UE et détruits par Israël.
3. Après l’attaque israélienne de décembre 2008, juger les responsables des violations du droit
Question : Israël, comme tout Etat, doit rendre des comptes par rapport à ses actes. Plusieurs acteurs, présents sur le terrain ou lors de missions d’observations (notamment dans le contexte de l’attaque israélienne), ont décrit des faits constitutifs de crimes de guerre, voire de crimes contre l’humanité. Que comptez-vous faire pour que les responsables soient jugés ? Allez-vous demander la mise en place d’une commission internationale d’enquête indépendante, sous l’égide des Nations unies ?
A l’exception du CDH qui ne s’est pas prononcé, l’ensemble des partis interrogés insistent sur la nécessité d’enquêter sur les violations du droit international pendant l’attaque israélienne dans la bande de Gaza.
Pour le PS , aucun Etat n’est au-dessus des lois. Israël, comme tous les autres Etats du monde, doit se soumettre à la légalité internationale. Il en va de même pour les dirigeants israéliens. De l’avis de nombreux observateurs, l’offensive contre Gaza a donné cours à des exactions dont certaines peuvent être assimilées à des crimes de guerre. Il est dès lors primordial que les responsables (auteurs et instigateurs) de ces crimes répondent de ceux-ci. L’idéal serait qu’ils soient traduits devant des tribunaux israéliens, et sinon, devant une juridiction internationale .
ECOLO manifeste son soutien « aux initiatives internationales sous l’égide des Nations Unies et de la CPI pour enquêter sur les violations du droit international entre les parties au conflit ». Il interpellera le Conseil européen, une fois connues les conclusions de la commission d’enquête des Nations unies menée par Richard Goldstone, « pour blacklister les présumés coupables de violations du droit international humanitaire ». « Il y a eu crimes de guerre et probablement crimes contre l’humanité à Gaza ».
Pour la LCR , « C’est un minimum, il faut aussi empêcher l’entrée dans l’Union européenne des criminels de guerre et de leurs complices ».
4. Le dialogue avec le Hamas
Question : L’Union européenne s’est récemment prononcée pour un gouvernement palestinien d’unité nationale. Comment pensez-vous que l’UE puisse faciliter la mise en œuvre d’un dialogue avec le Hamas ? Demanderez-vous pour cela le retrait du Hamas de la liste européenne des organisations terroristes ?
Tous les partis répondent en faveur d’un dialogue avec le Hamas dans le cadre d’un gouvernement d’Union nationale.
Pour le PS , le Hamas est un parti extrémiste. Si un parti extrémiste arrive au pouvoir par la voie des élections démocratiques, il acquiert incontestablement une légitimité à tout le moins au regard du peuple qui l’a élu. Ce choix doit être respecté au plan de la communauté internationale. Mais respecté ne signifie pas encouragé.
La LCR défend sans équivoque le retrait du Hamas de cette liste européenne. La LCR dit soutenir la résistance palestinienne dans son ensemble et estime que le Hamas doit être considéré comme un interlocuteur légitime
Pour le CDH , il faut faire la distinction entre le fait de discuter avec le Hamas (pouvoir de fait à Gaza et partenaire possible d’un gouvernement d’union nationale en Palestine) et le fait de ne plus le considérer comme une organisation terroriste. Le CDH se réfère à l’évolution de la position américaine de discuter avec le Hamas tout en considérant qu’ « Il faut continuer à exiger du Hamas de renoncer à la violence, de reconnaître l’Etat d’Israël et d’accepter les accords existants, en ce y compris la Feuille de Route (à savoir, les 3 conditions fixées par le « quatuor »).
5. L’exportation d’armes européennes à destination d’Israël
Question : Des armes européennes ou fabriquées avec des composants européens sont utilisées par Israël par le biais de frappes indiscriminées contre des civils, en violation du droit international humanitaire. En décembre 2008, le Conseil des ministres a adopté un code de conduite (contraignant) sur l’exportation de technologie et d’équipements militaires à destination de pays tiers. Lors de son attaque, l’armée israélienne a utilisé du matériel militaire européen. Quelles mesures comptez-vous prendre pour que les Etats membres respectent ce nouveau code de conduite dans leurs rapports avec Israël ?
La LCR demande également qu’ « un embargo sur toutes les armes » à destination d’Israël soit décidé. Pour la LCR, i l faut sanctionner les responsables des firmes et institutions qui tirent profit et collaborent au maintien de l’occupation et de la colonisation, comme ce fut le cas pour les firmes qui ont soutenu et collaboré au régime d’apartheid.
Pour le PS , il est évident que le code de conduite européen sur l’exportation de technologie et d’équipements militaires à destination de pays tiers doit être strictement appliqué, y compris quand il s’agit d’Israël. Il appartient au Parlement européen d’être vigilant dans ce domaine.
Le CDH « se réjouit de la décision des gouvernements fédéral et fédérés du 9 février 2009, de ne procurer aucune licence d’exportation d’armes qui renforcerait la capacité militaire des forces en présence ».
6. Conférence internationale sous l’égide de l’ONU
Question : Après l’échec du processus d’Annapolis, demanderez-vous la tenue d’une Conférence internationale sous l’égide de l’ONU fondée sur le droit international, avec un calendrier et des garanties d’application ?
ECOLO estime que l’Union européenne doit sans plus attendre prendre une initiative résolument axée sur la convocation d’une Conférence internationale réunissant tous les principaux acteurs concernés en vue de finaliser les propositions de paix existantes, et notamment l’initiative de paix arabe.
Par contre, pour le PS , la solution est … l’initiative de Genève qui est la « synthèse remarquablement faite, de manière informelle, par des gens de bonne volonté » … Pour le PS, Il ne faut donc pas inventer la solution, elle est connue ; ce qu’il faut, c’est la volonté politique de l’appliquer.
Pour la LCR , cela peut être intéressant mais les conférences internationales ne doivent pas servir de « cache-misère » ou de soporifique. Il faut soutenir les mouvements et revendications populaires légitimes, notamment dans le cadre de BDS (boycott, désinvestissement et sanctions). La LCR rappelle également que la Belgique exercera la Présidence de l’UE en 2010 ; elle aura dans ce cadre un rôle important à jouer à tous les niveaux.
Le CDH ne s’exprime pas sur le sujet mais conclut en rappelant l’importance pour lui que l’Union européenne adopte une position commune, dans le cadre d’une stratégie diplomatique plus claire et plus cohérente au Proche-Orient.