NDLR: non seulement organiser une manifestation populaire est apparemment un crime, c’en est un qui mérite la prison à perpétuité. Comme il est évident que le gouvernement d’Israël n’a aucune intention de mettre fin aux vols de terres qui sont à l’origine de ces manifestations, en premier lieu, ils doivent enfermer l’organisateur, ou le messager, si vous voulez. Ceci devrait mettre en veille toute idée, aux États-Unis ou d’Israël, que cette politique de «détention administrative» est acceptable, car elle ne vise que les «pires des pires bombes à retardement », etc
Abdallah Abu Rahma devait être libéré de prison jeudi dernier, après avoir purgé une peine d’emprisonnement d’un an, à laquelle il a été condamné. Il reste en prison après que la Cour d’appel militaire a ordonné aujourd’hui de le maintenir derrière les barreaux, en attendant une décision suite à l’appel du Procureur militaire.
Le Juge-Lt Colonel Aharon Mishnayot, chef de la Cour d’appel militaire, a accepté aujourd’hui la requête du procureur militaire de prolonger la détention d’Abdallah Abu Rahma, passé le terme auquel il a été condamné et qui a pris fin jeudi dernier. Cette décision intervient après l’audience dramatique, jeudi dernier, au parquet militaire de la requête de dernière minute de prolonger provisoirement la détention d’Abu Rahma, audience qui a eu lieu à la date prévue pour sa libération. La décision contredit la jurisprudence de la Cour suprême israélienne sur la question, demandant que le prisonnier ne soit maintenu en détention après les sciences de sa peine que dans les cas plus extraordinaire.

Gaby Lasky, l’avocat d’Abu Rahma a déclaré : « La décision de maintenir Abdallah Abu Rahma en détention, même après la fin de sa peine est une parodie de la notion même de justice, mais n’est pas une surprise. Le parquet militaire et les tribunaux sont une machine bien huilée de procédures judiciaires injustes politiquement motivées. »
Le mois dernier, le 11 octobre, Abu Rahma avait été condamné à douze mois d’emprisonnement pour son rôle de premier plan dans le succès de la campagne de son village contre la construction de la barrière de séparation d’Israël sur ses terres. Abu Rahma a été reconnu coupable de charges de liberté de parole, d’incitation et d’organisation de manifestations illégales, mais il a été disculpé de toutes les charges le reliant à la violence.
Abu Rahma a été déclaré défenseur des droits de l’homme par l’Union européenne, sa condamnation a provoqué l’indignation internationale et a été dénoncée par les organisations des droits de l’homme et par la communauté internationale, y compris le chef de la politique étrangère de l’UE, Catherine Ashton.
Dans un cas similaire à celui de Adeeb Abu Rahmah – un autre militant Bil’in – la Cour d’appel militaire a récemment ordonné que l’organisateur de Bil’in reste en détention provisoire en dépit du fait qu’il a purgé sa peine e ou totalité. La Cour d’appel a de façon spectaculaire endurci la peine d’un an imposée à l’origine à Adeeb Abu Rahmah en première instance, en l’augmentant de moitié, la portant à 18 mois d’emprisonnement.
Contexte
Abu Rahma, coordinateur du Comité Populaire de Bil’in contre le Mur et les Colonies, a été arrêté l’an dernier par des soldats qui ont attaqué sa maison au milieu de la nuit et a ensuite été mis en accusation devant un tribunal militaire israélien sur des accusations non fondées qui comprenait le lancer de pierres et la possession d’armes. Abu Rahma a été innocenté à la fois des jets de pierres et des accusations de possession d’armes, mais il a été reconnu coupable de provocation et d’avoir organisé des manifestations illégales.
Un cas exemplaire de mauvaise utilisation du système juridique israélien par l’armée en Cisjordanie dans le but de faire taire la dissidence politique légitime, la déclaration de culpabilité d’Abu Rahma a été l’objet de sévères critiques internationales. Le chef de la politique étrangère de l’UE, Catherine Ashton, a exprimé sa profonde préoccupation « que la possibilité d’emprisonnement de M. Abou Rahma soit destinée à l’empêcher lui et d’autres Palestiniens d’exercer leur droit légitime à manifester […] », après que des diplomates de l’UE ont participé à toutes les audiences du cas d’Abu Rahma. La déclaration d’Ashton a été suivie par celle du Parlement espagnol.
Le célèbre militant sud-africain pour les droits de l’homme, l’archevêque Desmond Tutu, a appelé Israël à annuler la déclaration de culpabilité d’Abou Rahmah au nom des Anciens, un groupe de personnalités internationales considérées comme des hommes politiques chevronnés, des militants pacifistes et des défenseurs des droits humains, réunis par Nelson Mandela. Les membres des anciens, y compris Tutu, ont rencontré Abou Rahma lors de leur visite à Bil’in, avant son arrestation.
L’organisation internationale des droits de l’homme Amnesty International a condamné la déclaration de culpabilité d’Abu Rahmah comme étant une attaque contre le droit à la liberté d’expression. Human Rights Watch a dénoncé la condamnation, en déclarant l’ensemble du processus comme étant « un procès inéquitable ».
Contexte juridique
Abu Rahma, coordinateur du Comité Populaire de Bil’in contre le Mur et les Colonies, a été acquitté de deux des quatre accusations portées contre lui dans l’acte d’accusation – jets de pierres et d’une ridicule et vengeresse charge de possession d’arme. Selon l’accusation, Abou Rahma a recueilli et utilisé des gaz lacrymogènes et des douilles de projectiles tiré sur les manifestants, avec l’intention de les exposer pour montrer la violence utilisée contre des manifestants. Cette accusation absurde est un exemple clair de la façon dont le procureur militaire est pressé d’utiliser les procédures légales comme un outil pour faire taire et réprimer la dissidence non armée.
Le tribunal a cependant déclaré Abu Rahma coupable de deux des articles les plus draconiens contre la liberté d’expression dans la législation militaire : la provocation et l’organisation et la participation à des manifestations illégales. Cela, en se fondant uniquement sur des témoignages de mineurs qui ont été arrêtés au milieu de la nuit, privés de leur droit à un avocat et tout en reconnaissant les défauts importants dans leur interrogatoire.
Le tribunal ne s’est pas laissé décourager par le fait que l’accusation n’a fourni en aucune façon des preuves concrètes impliquant Abu Rahma, malgré le fait que toutes les manifestations de Bil’in sont systématiquement filmées par l’armée.
Selon le droit militaire, la provocation est défini comme « la tentative, verbalement ou autrement, d’influencer l’opinion publique dans la région d’une manière qui peut troubler la paix publique ou d’ordre public » (article 7 (a) de l’Ordonnance relative à l’interdiction des activités de provocation et de propagande hostile (n ° 101), 1967), et implique une peine maximale de 10 ans.
22 novembre 2010
Bacon Jesse, du Comité de coordination de lutte populaire
source : The Only Democracy?
traduction : Julien Masri